Extrait du journal

Les cochers ne voulaient pas marcher, et leur vo lonté contribuait encore à paralyser les roues. Ils de mandaient des sommes énormes pour tenter une course d’un quart d’heure : 20 fr., 25 fr. et même 30 lr. pour aller à la Madeleine , qui est à dix pas. De nombreux accidents sont arrivés. A huit heures, Paris industriel et commerçant était debout ; chacun avait semé devant sa porte du sable ou de la cendre, et la circulation pour les piétons de venait plus facile. Mais, ô surprise 1 ô phénomène ! une heure après le dégel commençait sur une vaste échelle, mais au grand déplaisir des patineurs, et, on peut le dire, de la grande généralité des Parisiens. Car, à Paris, le neige et la glace sont toujours ac cueillies avec joie. Un temps sec et froid n’est certes pas habituel pendant l’hiver. Nous avons plutôt de la pluie et de la boue, et nous sommes heureux d’un peu de gelée, qui rend à moins de circonstances excep tionnelles, les rues praticables, et surtout qui permet le patinage. Aujourd’hui, le veut du sud souffle, et une eau presque tiède tombe en abondance; nous avons un fort vilaiu temps, mais il ne reste plus de traces de l’hiver. Le thermomètre marque 10 degrés au-dessus de zéro, et c’est à peine si nous avons franchi la fête des Rois, le moment le plus rigoureux de la saison, ai-je entendu dire toujours par uos aînés. Qu’est-ce que la fête des Rois? II La religion catholique nomme cette fête Epiphanie, c’est-à-dire manifestation. Vous savez, mon cher rédacteur, que les mages, prêtres de la religion des anciens Perses, formaient une corporation vouée à la fois au culte et aux scien ces. Us reconnaissaient un être suprême, dont le feu était le symbole. Parmi les sciences, ils cultivaient surtout l’astro nomie, l’astrologie et les sciences occultes, ce qui leur a fait attribuer une puissance surnaturelle, dont le souvenir se conserve encore dans notre mot magie. On croit que la prophétie de Balatn : « Une étoile sortira de Jacob, un rejeton s’élèvera d’Israël, » était connu parmi eux ; aussi à la vue de l’étoile miracu leuse, trois d’entre ces mages, que la tradition appelle des rois, se mirent en route à la recherche du Messie nouvellement né. Après 1 avoir trouve a Bctlileem, où Hérode u’avait pas voulu les suivre, ils adorèrent ce dieu, et ouvrant leurs trésors, il lui offrirent de l’or, de l’eucens et de la myrrhe. Ces présents étaient symboliques et mys térieux : par l’or ils reconnaissaient que Jésus était roi; par l’encens, qu’il était Dieu, par la myrrhe, qu’il était homme passible et mortel. En Espagne, en Allemagne surtout, la fête des rois mages a engendré les coutumes quelquefois les plus bizarres. Eu France, il n’y a pas de choses de ce genre : tout se passe en famille....