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L’Émancipateur, 12 novembre 1908

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L’Émancipateur
12 novembre 1908


Extrait du journal

faut une semaine pour récolter ses pom mes de terre ; il ne lui est guère nossible de faire ailleurs plus de quatre semaines qui, à 30 sous par jour, donnent 36 fr.. je mets 40 fr. Cela donne pour la bonne saison, de la Saint-Jean à la Saint-Mar tin, un total de 270 fr. « Arrivent les mois d’hiver : fin no vembre, décembre, janvier, février et mars. En ces 140 jours le tâcheron ne fait pas plus de cent journées de travail à 1 fr. 50 au maximum, soit 150 fr. « Restent les trois mois de printemps • avril, mai et juin. En avril l'homme doit bêcher son jardin et planter ses pommes de terre ; il peut faire quand même deux semaines à 2 fr. par jour, soit 24 fr. « En mai, il a souvent chômage ; je prends néanmoins 4 semaines à 15 fr. : Go fr. En juin, avant la Saint-Jean, deux semaines — il lui en faut une nour le piochage de ses pommes de terre — à 3 fr. par jour : 3G fr. « Cela fait pour l’ensemble de la se:onde période une nouvelle somme de 270 fr. « Soit pour l'année entière... » — re tenez bien ce chiffre, qui est contrôlable, qui ne peut pas être contesté, puisqu’il s’appuie sur des réalités indiscutables — «... un gain annuel maximum de 540 fr. « Supposons cet ouvrier marié et père de trois enfants et voyons les dépenses du ménage. « D'un salaire annuel de 540 fr., il faut déduire, pour le loyer et le pain, 400 fr. au moins, les 140 fr. qui restent doivent donc suffire à l’entretien de 5 per sonnes, au chauffage toujours très cher à cause de la conduite, à l'achat des outils scolaires quand les enfants vont en clas se. » Et sans doute, les conditions de la vie ont changé; oui, on boit un peu de vin, on boit un peu de café, on s'habille un peu mieux ; mais allez-vous refuser à ceux qui donnent, en France comme dans toutes les autres nations — c’est une banalité de le dire — des produits essentiels indis pensables à ia vie? Allez-vous leur refuser de prendre une part des jouissances, que ceux qui ne travaillent jamais peuvent s’of frir sans aucune espèce de limitation? Edouard Vaillant. — Très bien ! Paul Constans. — N’est-il pas nor mal, naturel que les travailleurs des champs veuillent, eux aussi participer à la vie moderne? Si vous voulez que les travailleurs des champs restent dans les campagnes, si vous voulez que les cultivateurs ne soient pas tentés de s’en aller dans les villes, avec la pensée d’y trouver une existence moins dure, voulez-vous faire diminuer les demandes de places, au lieu de pro noncer seulement de grands et beaux dis cours sur la poésie des champs, occuponsnous, par des lois sociales, par des mesu res qui s’imposent, à rendre moins aléa toire la vie des travailleurs des champs, et si vous leur permettez d’avoir les loi sirs indispensables, ils pourront comme vous admirer à leur tour la beauté de la nature qui les environne. (Applaudisse ments à l'extrême gauche). M. Ruau, ministre de l'Agriculture, après avoir répondu aux différents ora teurs avait terminé son discours par les paroles suivantes: Le Ministre. — Tout ce qui a été fait en France a tendu à maintenir dans un pays d’agriculteurs la petite propriété comme base et sauvegarde de l’ordre so cial. Je ne fais pas aujourd’hui de déclara tions d'ordre politique, mais j’affirme qu’aucun des représentants du socialisme ne peut me démentir ; au contraire ses orateurs et ses écrivains sont d'accord avec moi et reconnaissent qu’il faut con server la petite propriété, parce qu’il 14y a pas d’autre moyen de résoudre la ques tion sociale. Mais le citoyen P. Constans demande aussitôt la parole et a fait au ministre, la vigoureuse riposte suivante : Paul Constans. — La Chambre ne me pardonnerait pas évidemment d’insti tuer à l’heure actuelle un débat sur la question de propriété, mais vous com prendrez très bien qu’il n’est pas possible de laisser passer l’affirmation produite à la tribune par M. le ministre de l’agricul ture sans y répondre un seul mot. Jamais aucun socialiste n’a dit que le but du socialisme était systématiquement, de parti pris, de détruire, de supprimer la propriété privée ; les socialistes ont pour but — et ils le déclarent hautement — de socialiser, de rendre collective la propriété capitaliste qui n’est pas cultivée, qui n’est pas mise en valeur par son propriétaire. Nous voulons exproprier le capitalisme entre les mains duquel la propriété est un instrument d’exploitation et d’oppression. (Très bienI très bien! à l’extrême gauche.) Quant à la petite propriété, quant au lopin de terre qui est travaillé par le cul tivateur, ce cultivateur-là n’exploite per sonne, il n exploite que ses bras, ses efforts et ceux de sa famille ; celui-là nous e défendons et vous ne pouvez pas le défendre commue nous le faisons, parce que la propriété capitaliste qui vous im pose ses volontés tend de plus en plus à supprimer la petite propriété. (Très bien! très bien! à l’extrême gauche)....

À propos

L'Émancipateur est un hebdomadaire socialiste publié à Bourges à partir de 1906. Il paraît clandestinement sous l'Occupation, puis disparaît en 1952.

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