Extrait du journal

rieur d’une nation, les paysans avaient le droit de spéculer sans frein sur leur blé, ou les mineurs sur leur charbon. Il ne peut qu’en résulter un malaise général, des mécontente ments et des représailles ne permettant pas la paix véritable. Si un tel étal de choses continuait, la France et l’Italie en arriveraient à ne plus pouvoir exporter ni même produire à leur suffisance, et, par conséquent, à ne plus pou voir acheter. Leurs opulents fournisseurs se raient ainsi, en fin de compte, victimes de leur spéculation. Il y avait ainsi, dans les villes italiennes du Moyen Age, « les gras » et « les mai gres ». L’égoïsme des « gras » n'a jamais porté bonheur ni à leur cité ni à eux-mêmes. Mais ici l’injustice s’aggrave encore du fait que nous avons maigri pour une cause qui n’était pas moins celle des gras que la nôtre. Si nous avons particulièrement besoin de l’Amérique et de VAngleterre, c’est par ce nous avons sans compter accumulé les sa crifices. N’ayant pas marchandé notre part de malheur, nous avons le droit de demander à nos amis de ne pas nous marchander une part de leur prospérité. Qu’ils n’oublient pas que si notre trésorerie est lourdement obérée, c’est surtout parce que nous avons à faire face à la restauration des régions dé vastées; et que si notre activité économique s’est ralentie, c’cst que nous avons donné pour la guerre toutes nos forces vives. \ Nos gouvernants ont eu le tort d’admettre la suppression de l’office de distribution ré clamée par i Angleterre. Nos amis d’outreManchc et d’outre-Atlantique peuvent ainsi arguer qu’ils n’avaient pas à se montrer plus royalistes que le roi. Mais, maintenant que l’évidence des faits nous oblige à nous re tourner vers eux, leur sentiment de la justice, comme leur intérêt bien compris — qui n’est pas l’intérêt d’un jour — leur font un devoir de ne pas rester sourds à notre appel. Yvon DELBOS....