Extrait du journal

Aujourd’hui sera inauguré, à Saint-Amandles-Puers, sur l’Escaut, le tombeau d’Emile Y erhaeren, né en Flandre et grand poète de langue française. Sa mort, pendant la guerre, avait été affreuse, mais parmi tant d’autres non moins cruelles, avait passé presque inaperçue : il avait été broyé par le train qu’il allait pren dre après une conférence, dans la gare de Rouen. Les Villes tentaculaires, au temps du symbo lisme, avaient révélé son talent aux traits durs d’imagier presque gothique, dont la vigueur étonnait parmi tant de mirages et de chimères. Plus tard, ayant raboté par un patient travail quelques aspérités de la forme, il était arrivé, avec Hélène de Sparte, à une harmonie digne des classiques. Sa vie retirée fut un constant exemple de désintéressement fier. Les malheurs de la guerre et ceux, en particulier, de la terre natale qui l’avait nourri de sa forte sève, l’avaient pro fondément affligé. 11 songeait peut-être, quand une distraction, que ses compagnons de voyage ne prévoyaient pas, le laissa surprendre par l’accident fatal. Sa gloire, lente à venir, n’a rien à craindre et ne peut que grandir désormais. Louis LALOY....