Extrait du journal
Si nos grands hommes politiques »’abstenaient de discourir le Dimanche, nous serions bien heureux, nous autres, les petites gens, qui ne demandons qu à manger en paix notre mauvais pain d’état de siège. Le Français moyen a mal aux nerfs; il est las d’entendre les homélies des prêcheurs dominicaux. Les discours n'ont jamais rien prouvé, si ce n’est la facilité avec laquelle le plus médiocre politicien arrive à parler pour ne rien dire. Passe encore en temps de session par lementaire ordinaire, ou même extraor dinaire. Dans Parlement, il y a parler. C’est la racine du mot. Un Parlement muet serait un non-sens. Ainsi, les députés doivent tenir des propos à la Chambre. Quand ils se taisent, ils sont proie aux ennuis. Dans leur circonscription, l’électeur dit : « Notre député vote bien, mais il ne parle pas. » L homme tra vaille de son mieux; il siège dans les Commissions, écrit des rapports, rédige des avis motivés, et court la poste de ministère en ministère, facteur pliant sous le poids de lettres-missives recom mandant à la vigilance de son attention d’honorables personnes tout à fait di gnes de son bienveillant intérêt. Il exerce donc sa profession, en bon père 'de famille. Malgré tout son dévoûment, il n'est point passé grand homme dans son terroir. « C’est un bien digne repré sentant, dit-on, mais il ne parle pas. » A la fin, harcelé par les conseilleurs, qui l incitent à monter aux rostres, notre député, ayant, en une séance du matin, jaugé le tonnage de la tribune, se décide à grimper à l'abordage. La Renommée en marbre blanc qui souffle dans un tuba et l’Histoire qui grave sur son livre les paroles définitives prononcées sous le coupe-papier du Président entendent une intervention de l’excellent homme, et négligent de la retenir. Le charme ensorcelleur est rompu; la glace brisée. M. le député a parlé. Il est considéré. Le malheur est qu ayant goûté au verre d’eau sur la planchette d'acajou, il réci dive. Mais la perfection n’est pas de ce monde, ni de l’autre. Pendant la session, la parole est d’ar gent. Durant les Vacances, le silence est d’or....
À propos
L’Ère nouvelle a été fondée en décembre 1919 par deux socialistes déterminés, blessés de guerre : Yvon Delbos (1885-1956) et Gaston Vidal (1888-1949). Elle se définit en se sous-titrant « L’Organe de l’entente des gauches », et restera tout au long de son existence proche du parti radical. Malgré son faible tirage, le journal exerçait une influence importante dans le monde parlementaire.
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