Extrait du journal

A propos de la rentrée, je lis quelque part, dans un journal pédagogique, que l'on a les plus mauvaises nouvelles du grec. Le pauvre grec était déjà très malade; maintenant, il serait mort. Peut-être vous souvenez-vous de ce qui s'est passé à son endroit. C'est une histoire assez mélancolique et très instructive; elle se rattache à la vieille querelle des anciens et des modernes. C'est un épisode de cette illustre bataille. Autrefois, l'enseignement était uniquement basé sur le latin et le grec. Tout le monde parlait latin, tous ceux,du moins, qui sortaient du commun et recevaient quelque éducation. On n'y, avait presque aucun mérite. Il n'existait pas un petit clerc tonsuré, un étudiant en Sorbonne, Un avocat, un médecin, qui, dès l'enfance, ne se fût farci la mémoire des poèmes de Virgile et des périodes de Cicéron. On écrivait et l'on pensait en latin. Le grec correspondait à un degré de culture plus raffiné. Le bon helléniste jouissait d'une estime particulière. Ce n'était plus le simple lettré, c'était le lettré supérieur, le « mandarin ». Rappelezvous l'entrée de Vadius dans les Femmes Savantes. Ce pédant n'a qu'un titre à l'admiration des précieuses, et Trissotin a bien soin d'y insister. Il sait le grec. Cela lui donne un prestige qui se traduit par de longs murmures d'admiration; d'avance, elles se pâment à ce qu'il dira....