Extrait du journal

M. Demblon triomphe. Sa thèse se tient. Elle est, ma foi, plausible. Faut-il s'y rallier? Craignons d'être dupe de l'illusion. Méfions-nous des racleurs de parchemins, des critiques à systèmes, des exégètes subtils. Ce sont gens artificieux et machiavéliques qui excellent à mettre de leur côté les apparences de la logique et de la vérité. Rappelons-nous que l'industrieux M. Loquin réussit à prouver l'identité de' l'Homme au Masque de Fer et de Molière. Sa documentation n'a pas prévalu. Celle de M. Demblon aura probablement le même sort. Elle éveillera moins de crédulité que de scepticisme. La postérité continuera de croire que Le grand comique, expira le 15 janvier 1673, après la cérémonie du Malade Imaginaire. Elle ne consentira pas sans difficulté à I'anéantissement de la personnalité de Shakespeare. Elle ne renonce pas à ses vieux cuites. Elle hésiterait à s'incliner devant l'évidence. Or, l'évidence en ce domaine: est rarement établie. Aux raisons spécieuses, tirées de textes équivoques trop adroitement interprétés, s'opposent des raisons de sens commun ou de sentiment robustes, persuasives et presque toujours victorieuses... L'autre jour, à L'Université des Annales, Jean Richepin les a réunies en un faisceau, serré et puissant Il n'est rien de tel qu'un poète pour louer un poète, Je voudrais vous citer ces paroles indignées, enflammées, y ajouter l'accent de la voix, le feu du regard, l'action irrésistible du geste. « Supposez-vous, nous dit Richepin, qu'un homme comme Bacon ou lord Rutland, ayant conscience d'avoir produit une oeuvre admirable, aurait con-...