Extrait du journal

JAMAIS je n'oublierai l'enthousiasme de Jean Richepin lorsqu'il y a deux ans, au sortir de la fête de l'Université des Annales à Meudon, il vit s'envoler, pour la première fois, un aéroplane. Notre ami Lazare Weiller avait eu la gracieuse pensée d'offrir cette distraction aux « Annalettes »; il ne se doutait pas qu'il allait suggérer à un poète l'idée d'un livre. C'est ce jour-là, certainement, que Richepin conçut le dessein, sinon le plan, du foman paru d'hier. Je viens de le lire avec émotion. L'Aile est un livre puissant, mais taon pas de la façon que vous pourriez supposer d'après sontitre. Ce n'est point un récit d'aventures extraordinaires, à la Jules Verne; ses beautés ont un caractère plus intime, plus profond. Ce' sont des beautés psychologiques. Jean Richepin a entrepris d'atudier l'élaboration la soudaine explosion de ce phénomène qu'on appelle le « génie » Qu'est-ce que le « génie » ? D'où sort-il? Quelles causes obscures et lointaines contribuent à le former? A quels signes le reconnaît-on ? Problème délicat, complexe, auquel une infinité d'autres questions sont liées. Voici, brièvement exposé, le cas proposé à nos réflexions par le romancier. Le professeur de physique Gasguin a une fille Geneviève, qui est douée, ainsi que Pascal, du génie mathématique. Il cultive ces dons, il enseigne à l'enfant tout ce qu'il sait lui-même, il révèle, sous son nom à lui, ce qu'elle invente ou découvre et acquiert de ce chef lune glorieuse réputation. Geneviève le supplie d'agir de la sorte; elle est timide et recherche l'ombre et le silence. Elle ne connaît âme qui vive,...