Extrait du journal

Al. Ernest La visse, membre de l’Académie française et directeur de l’Ecole normale supérieure, a saisi l’occasion d’une distribution de prix pour adresser aux enfants des écoles communales de Nouvion-en-Thiérache (Aisne), un discours sur la Patrie. Historien et éducateur, il a le droit de traiter ce sujet, qui est un de ceux auxquels il a sans doute le plus songé. Il sait mieux que personne ce qu’est la Patrie, comment elle s’est formée, comment elle a duré, com ment les hommes d’autrefois l’ont conçue, comment peuvent la concevoir ceux d’aujourd'hui. Il sait quel rôle le sentiment et l’amour de cette Patrie ont joué et jouent encore dans l'éducation de peuples autres que le nôtre, quel rôle ils peuvent jouer dans notre éducation nationale. Il a pensé à cela toute sa vie. Chaque année, il donne aux enfants d’une commune de l’Aisne d’excellents conseils qui portent un peu plus haut et plus loin que le modeste auditoire auquel ils sont adressés. Cette fois, il a cru devoir les entretenir du sujet brûlant dont ils entendaient parler partout autour d’eux. Inutile d’ajouter qu’il en a admirablement parlé, et qu’il a dit tout ce qu’il y avait à dire. Les garçonnets et les fillettes de Nouvion-eu-Thiérache ont pu goûter ce beau discours où l’orateur s’est efforcé de mettre à leur portée des idées généreuses et élevées ; mais il est probable que nous le goûtons plus encore. La leçon grave, émue, élo quente, passe un peu par dessus leur tôle pour atteindre de grands enfants qui en ont plus besoin qu’eux. La patrie, a dit M. Lavissse, est un ter ritoire habité par des hommes qui obéis sent aux mômes lois. Pour composer ce territoire et cette communauté, un grand effort a été nécessaire. Petits habitants de la Thiérache herbagère et forestière, vous qui avez l'esprit prompt et pratique, l’humeur querelleuse, et qui gardez dans votre parler des mots et des tours de 1a langue picarde, vous ne ressemblez guère aux petits Bretons qui, de leurs rochers, regardent en rêvant l’Atlantique et parlent la vieille langue des Celtes, ni aux petits Provençaux qui s’exclament en langue romane aux bords de la Méditerranée. Il...