Extrait du journal

Au coup de minuit, l*heure des crimes — et aussi des bêtises —la toile est, enfin tombée sur l’opérette qui se jouait depuis huit jours dans la salle des séances de la Chambre des dé putés. , Le projet Fabre,auquel le gouverne ment s’était rallié, le trouvant tout aussi orléaniste, que le sien, a importé tous les suffrages. ' Demain les Hôtes de Chantilly, qui, grâce à la concurrence des Bourbons et des Bonapartes, n’occupaient guère qu’un tiers du trône de France, vont pouvoir l’occuper tout entier. La loi votée cette nuit n’a,en effet,d’autre but que de les débarrasser de leurs rivaux, et de faire du comte de Paris l’unique prétendant à la couronne. Dès que le Sénat, en sa qualité de monarchiste constitutionnel, aura adopté cette loi précieuse, le prince Napoléon sera ex pulsé d’autant plus promptement que le gouvernement ne sait que faire de lui, et les conspirations orléahistes re commenceront avec un redoublement d’intensité. La mise en disponibilité des princes sera pour eux une simple dispense du service militaire; et de même que le cabinet s’est réservé le droit de lés ex. pirisers’ils troublent la .paix publique il s’est réservé -, celui de les remettre ei activité s’ils ne la troublent pas. Devant les révélations des journaux et les réclamations de l’opinion publi que, il fallait à tout prix que le gou vernement, bien résolu à ne rien faire, eût cependant l’air de faire quelque chose. Ge quelque chose ce sera l’ex, pulsion du prisonnier de la Concierge rie, mesure qui ne peut que combler de joie le duc d’Aumale. Hier, les d’Orléans pouvaient croire qu’ils conspiraient seuls; maintenant que la complicité du gouvernement, de la Chambre et du Sénat dans leurs complots est éclatante, Us n’ont même plus à se cacher. Il ne reste plus au Parlement qu’à voter la reconstruction des Tuileries. Jamais la famiUe qui les a quittées si précipitamment en 18A8 n’a été plus près d’y rentrer. HENRI ROCHEFORT...