Extrait du journal

La chronique des tribunaux nous rapporte un fait inouï, l’un des plus monstrueux que le journalisme puisse citer depuis dix ans. Un homme appartenant à la réserve de Tannée active fit ses vingt-huit jours au dernier automne. Justement ou injustement, un brigadier lui in fligea alors une punition, et lui, à tort ou à raison, garda,rancune au briga dier. Ces choses se passaient à Châlons. Le temps des vingtrhuit jours ac compli, le réserviste, rendu à la liberté et àJ’égalité civiles, se trouvait dans ses foyers, à Paris, quand, quatre mois plus tard, il apprit que le régi ment où il avait fait sa réserve était à la caserne d’Orsay. Il s’y rendit, et, re devenu citoyen, demanda violemment compte au brigadier de sa sévérité ou de son hostilité passées. Cet homme, nommé Calmés, était peu après arrêté à son domicile, jeté’ dans une prison militaire . Traduit de vant un conseil de guerre, il vient d’être condamné à huit ans de travaux publics. L’ancienne armée française, la vraie, celle qui fut l’admiration et la-terreur de l’Europe, avait ses défauts, mais elle avait aussi sa.grandeur. Si, au temps de ces vieux grognards qu’on n’a pas encore oubliés, un homme eût pu se trouver dans lès conditions de Calmés, et, comme lui, levant tout à coup sa canne comme citoyen après avoir courbé la tête comme soldat, fût venu rappeler à un brigadier qu’ils...