Extrait du journal

• Quand- on critique, icr.-ou ailleurs, la po litique de M..Chéron, celui-ci répliqué avec une grâce un peu lourde,, en déformant la thèse de ses contradicteurs : « Qu’il pleuve,' qu’y vente, qu’il gèle, disait-il récemment, c’est la faute1 à Chéron ! Je soutiens-la cause de la production agricole, et, au surplus,, ma,devise est- : bien faire .et lais? ser dire. » Il ne s’agit pas de la température. Il s’agit de l’augmentation du prix du ,pàin, porté à 1 fr. 20. Voilà un grief beaucoup plus précis et sur lequel le ministre de l’Agriculture n’a donné que_de très vagues justifications. La deuxième commission du Conseil Municipal de Paris, en protestant contre la mesure, a tenu à en laisser, toute la responsabilité à M. Chéron, « dont la politique économique reste systématique ment contraire aux intérêts des consom mateurs. » On nous objecte : Soit, les consomma teurs, sont un peu gênés ; ce n’est qu’un mauvais moment à passer. Par contre, Chéron assure la fortune du -paysan, du petit rural. C’est là une politique à longue portée dont vous ne pouvez méconnaître l’utilité sociale. Je réponds : En êtes-vous bien sûr ?' Sans doute, il existe des seigneurs de l’agriculture, des possesseurs, de grands fonds terriens qui rendent grâce à cette politique. Et, par exemple, en ce moment même, qui donc a stocké les 8 millions de quintaux de blé français qui vont assurer la soudure jusqu’à la prochaine récolte ? Sont-ce les petits paysans, dont le-lopin de terre a produit de 1 à 50 quintaux- ? Pas le moins du monde. Ceux-ci n’ont eu ni le moyen ni le temps d’attendre: Ils ont vendu leur récolte à 70 francs, cependant que les grands fermiers de la Bcauce et du Perche, qui n’avaient pas fait encore battre leur blé, commencent seulement à le céder au-dessus de 100 francs. Un économiste, qui a donné ici même des -études fort remarquées, M. Germain Martin, vient d’apporter à notre thtgse une éclatante confirmation. « La hausse du pain, dit-il, préjudiciable aux/petits mé nages ouvriers et bourgeois, n’est pas moins fâcheuse pour la terre. Les ouvriers agricoles n’ont pas de salaire fixe. A la veille des grands travaux, ils vont élever leur, prix basé sur le coût du pain. Ce prix de revient va peser sur la nouvelle récolte, qui, s’annonçant comme satisfaisante, don nera, par cela même, au cultivateur, ,un prix moins rémunérateur que l’an' der-; nier. » ■ Et M. Germain Martin montre que < la colère de l’opinion publique est d’autant plus explicable qu’on sait des minotiers dont la situation était précaire en 1914,, et qui mènent, aujourd’hui, un train de vie de 2 à 300.000 livres de revenus... On le voit, la légende d’un Chéron pro tecteur du petit paysan ' commence • ellemême d’être discutée. Mais, si elle s’ef fondre, qu’fest-ce donc qui lui restera ? LÉON BAILBY...