Extrait du journal

dressait à sa fiancée, la grande Mademoi selle, cousine-germaine du Roi-Soleil. Sans compter que nous avions enrobé notre de mande dans le plus gracieux sourire de circonstance qu’un homme puisse adresser à un agent du guet. Ah ! mes amis! En moins de temps qu’il n’en faut pour l’écrire, huit sergots étaient autour de moi, essayant sur ma pérsonne la force de leur biceps, hurlant que je venais do manquer de respect à la police. Le brigadier dressa procès-verbal de l’incident. Un agent, plus effrontément hardi que les autres, déposa que c’était moi qui avais voulu assommer les huit gardiens du poste. Comme je protestais contre cette outrecuidante affirmation, l’a gent en question me répondit à peu près textuellement : « Je sais bien que ce n’est pas vrai, mais comme « je suis assermenté » et que « vous ne l’ètes pas », c’est mon témoignage seul qui prévaudra devant le tribunal, et vous serez condamné ». **• »■ Pour terminer le récit de cette petite affaire personnelle, j’ajouterai que, quel ques Instants après cet incident, un offi cier de paix qui faisait sa ronde reconnut l’irxpudente bévue de ses subordonnés et me relâcha après m’avoir adressé des excuses. Ajoutons que cet officier de paix, qui^ était trop correct pour appartenir à un service administratif, ne fait plus partie de la préfecture de police. C’est le contraire qui est arrivé pour Constans. Lorsque le sinistre gredin arriva, pour la première fois, au ministère de l’in térieur, on demandait à un magistrat : — Vous avez connu ce Constans, lorsqu’il appartenait au cabinet du procureur géné ral Gastambide? - J’en ai connu un, en effet, qui était attaché au parquet de Toulouse, en 1855, répondit le magistrat; mais celui-là doit être au bagne. Hélas ! c’était bien, cependant, du même Constans qu’il s’agissait ; ce qui prouve, une fois de plus, que l’honnêteté n’est pas obligatoire pour avoir le droit d’occuper une fonction sous la République vidangisto — au contraire. « Je suis assermenté»; voilà ce qui cons titue la force des brutes recrutées pour le service de la police. Un de nos confrères, très indulgent pour les sous-ordres de M. Lozé, s’écriait un jour : « Mais ou ne peut pas choisir les gar diens de la paix parmi les académiciens! » Certes, cette affirmation est inutile; mais les contribuables qui paient ces agents ont bien le droit d’exiger qu’ils ne soient pas recrutés non plus parmi les escarpes et le monde de la haute pègre. C’est cependant ce qui arrive aujourd’hui. Un officier de paix disait un jour devant nous : « J’ai dans ma brigade un gardien qui pratique le vol à l'étalage, le préfet de police est prévenu et cependant il refuse de révoquer cet agent. » Parisiens, dormez tranquille», la ville de Paris est ainsi bien gardée! *** « Je suis assermenté »: cette exception judiciaire remplace les garanties morales qu’on est en droit d’exiger des agents de police et leur tient lieu aussi de brevet d’instruction. Un de ces idiots a adressé dernièrement l’ahurissant rapport suivant à son chef hié rarchique; cette pièce est absolument au thentique; nous en respectons le style et l’orthographe. A 9 heures du matin , faubourg SaintAntoine, le nommé M.... Pierre, balayeur de la Ville, lequel balayé son ruisseau et par le cou rant de l'eau la cal en bois de ladite voiture à bras s’est déplacé en arriére et s’est cassé le brancard du côté gauche au moment que le nommé D... (Jean-Baptiste), rue Baudricourt, lequel conduisant la voiture an voulant l’at traper les brancards et c’est lui qui l’a cassé la voiture appartenant au sieur C..., loueur des voitures demeurant rue de la Roquette, 51. Les adresses ont été échangées. Nous n’étions pas témoins du fait. Signé ; G... Gardien de la paix....