Extrait du journal

Examinons un peu les conséquences probables de l’attentat de la rue de nohan, dans le cas où il eut amené la mort du roi d’Espagne et celle de M. Loubet. Dans le premier mouvement de stu peur, rien n’eut paru déranger l’ordre de choses actuel ; les corps des victimes eussent été rapidement emportés à l’Ely sée et au palais du quai d’Orsay ; le tu multe de la rue se serait apaisé et la grande majorité de la population n’au rait appris que le lendemain matin, en s’éveillant, le crime commis à mihuit et quelques minutes au centre de la ville. Ensuite, il aurait fallu penser tout d’abord à la succession des deux chefs d’Etat. On sait ce qui s’est passé après la mort de Carnot ; à Lyon il y eut des troubles, des maisons saccagées,des ma gasins, cafés,restaurants envahis et mis au pillage — surtout ceux tenus par des Italiens, car l’assassin était Italien. A Paris, l’esprit se serait égaré quel que temps ; si M. Loubet avait été tué par la bombe de l’Espagnol, le roi l’eut été de la môme façon et il est probable .que les Espagnols, en masse, ceux qui vivent à Paris n’eussent pas été malme nés par la foule, comme les Italiens à Lyon et ailleurs. Cependant des trou bles auraient eu lieu et les partis politi ques se fussent agités quelque temps. Mais le Congrès eut élu un autre prési dent et, à Paris, tout serait rentré dans le calme. Il est probable que sous le coup de l’indignation causée par l’attentat, le Congrès n’eut élu ni Combes, ni quel qu’un des siens, mais plutôt un homme d’ordre et un homme énergique. Les socialistes et les révolutionnaires Sauraient pas pu profiter de l’émotion générale pour s.’emparer du pouvoir et il est à présumer que leurs orateurs, les plus en vue, auraient été les moins in fluents, aussi bien dans le Congrès que dans la presse. De ce côté l’anarchie aurait donc fait fausse route : le parti de l’ordre aurait au contraire bénéficié de la haine et de la fureur soulevées dans la nation par les assassins qui se recommandent du parti socialiste et s’inspirent de ses écrits incendiaires et sanguinaires. Ainsi le but poursuivi par les propa gandistes par le fait eut été manqué comme il Va toujours été et comme il le sera toujours. En Espagne, la situation eut été plus embrouillée ; le roi n’a pas d’héritier direct ; une de ses sqpurs peut lui succé der ; l’enfant d’une de ses sœurs peut être aussi le futur roi. Mais il y a deux autres partis qui déjà se sont mesurés l’un contre Vautre : le parti carliste et le parti républicain. La mort du roi au rait donc pu être le signal de la guerre civile. Or, quel qu’eût été le parti vainqueur, c’est contre le parti révolutionnaire anarchiste que les mesures les plus dra coniennes auraient été prises. Aucun gouvernement ne vit dans le désordre ; même arrivé avec l’appui des hommes de désordre, il se retourne aussitôt con tre eux. Gela c’est de l’histoire tout sim plement. Les anarchistes peuvent faire des bar ricades, mettre une ville à feu et à sang, piller ; menacer des rois et de simples particuliers, jamais ils n’obtiennent, au point de vue social, le moindre avantage, la plus légère compensation de leurs violences. Gela aussi est de l’histoire. Une bombe a tué le Tsar Alexandre II : il y a eu un autre Tsar et les réformes signées par Alexandre II, le jour même de'sa mort, ont été forcément ajournées. Ces réformes, c’est Ni«olas qui les a re...