Extrait du journal
Bourges, 15 Mars BULLETIN POLITIQUE. La Presse républicaine s’escrime de son mieux pour donner au programme ministériel une signi fication toute autre que celle qui ressort du texte même de ce manifeste. Il semble que les feuilles radicales aient le mot d’ordre d’adoucir ce qu’il y a d’amer contre les gauches dans les paro les de M. Buffet. Elles reconnaissent, il est vrai, que le président du conseil ne flatte pas pré cisément les passions de ses nouveaux alliés, mais elles essaient d’accréditer cette opinion que M. Buffet, avant de se séparer de la droite, a voulu lui adresser quelques mots de politesse banale. La République française est, de tous les journaux celui qui se donne le plus de mal pour faire prévaloir cette interprétation. A l’entendre, le passage le plus important du programme serait la déclaration pas sablement comminatoire qui vise les « menées fac tieuses » de certains partis, c’est-à-dire du groupe de l’appel au peuple. Le reste ne serait que de l’eau bénite de cour. Nous trouvons que la Gauche en prend bien à son aise avec le programme ministériel. Sans être dans la confidence de M. Buffet, nous ne croyons pas que les paroles du vice-président du conseil soient seulement de ces formules oratoires avec lesquelles on dupe les partis assez niais pour se laisser duper. Evidemment, l’intérêt politique, a défaut d’autre mobile, poussera nécessairement M. Buffet dans une voie de réaction plus ou moins accentuée contre les manœuvres du parti radical. Mais d’un autre côté, nous sommes bien obligés de tenir compte des bruits qui circulent autour de nous •t de convenir que le Manifeste avait été libellé en vue d’un mouvement stratégique qui a presque complètement échoué, Si une partie de l’Assemblée a été, en effet déçue par les déclarations ministé rielles, il parait presque certain que M. Buffet n’a pas été, de son côté, très satisfait de l’attitude de ses collègues. Les rares applaudissements qui ont accueilli sa profession de foi auraient même, nous dit-on, dérangé tous ses plans. On nous permettra de nous faire ici l echo des rumeurs qui se colpor taient dans les couloirs ? On disait que M. Buffet, reprenant pour son pro pre compte la lactique qui a si mal réussi à M. le duc de Broglie, voulait reconstituer une majorité dont les principaux éléments auraient été fournis par la droite modérée, le parti bonapartiste, le cen tre droit et une notable fraction du centre gauche. Dans ce but, M. Buffet avait rédige un programme dans lequel il s’efforçait de tenir la balance égale entre ces divers groupes Les amis du Président initiés à ce plan, l’avait jugé très habile et ne dou taient pas du succès. Quelle n’a donc pas été leur surprise quand ils ont vu l’accueil aussi peu enthou siaste que réservé du centre gaucho et même du centre droit ? On racontait même qu’un des intimes de M. Buffet avait préparé un ordre du jour tendant à donner au vice-président du conseil un témoi gnage de confiance ; la froideur par trop visible de* l’auditoire a tellement effrayé le détenteur du sus dit ordre du jour qu’il l’a prudemment conservé dans son portefeuille. Bien entendu, nous donnons cette histoire pour ce qu’elle vaut, et n’en garan tissons nullement les détails. La moralité que nous devons tirer de ces divers incidents est bien facile à déduire ; il en ressort que la politique de couloir ne vaudra jamais « celle politique à ciel ouvert * que préconisait, il y a deux mois à peine, dans son noble et fier langage, l’ho norable M. de Carayon-La-Tour. Les habiles qui ont voulu jusqu’ici « jeter à la mer » nos amis de l’ex trême droite, n’ont pas eu généralement à se féli citer du résultat de leurs efforts; cette stratégie leur a porté malheur. Ce n’est pas une conduite bien prudente, en effet, que de divorcer avec le seul parti qui obéisse à des principes nettement déter minés ; une fois séparés de nous, les tacticiens, dont nous parlions tout à l’heure, recourent à des expédients qui les conduisent à leur perte. Que le nouveau cabinet prenne garde de faire la nouvelle et triste expérience de ces insuccès ! 11 est encore temps pour lui de s’assurer la stabilité pour luimême et d’assurer, en même temps, la sécurité du pays, c’est de se rallier franchement à la droite qui porte haut et ferme le drapeau qu’elle tient de la France et de l’histoire !...
À propos
Initialement intitulé La République de 1848, le journal se rebaptisa Le Courrier de Bourges quatre années plus tard, en 1852. En 1872, le journal devint Le Courrier du Berry puis, de 1883 jusqu'à sa disparition en 1902, Le Messager du Cher. Il traitait en quatre pages de toutes sortes d’actualités (littéraires, agricoles, scientifiques et politiques) et soutenait une ligne favorable à ce qu’il nommait une « monarchie chrétienne et tempérée ».
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