Extrait du journal
Précautions nécessaires ...Bonjour, madame... Bonjour, monsieur... Bonjour, jeune homme... C’est sûrement à vous, ce grand garçon-là ? Il n’était pas avec vous quand vous êtes venus il y a... combien de temps déjà ?... Cinq ans ! Comme le temps passe !... Vous avez voulu sans doute voir la Chambre actuelle avant qu’elle ne se sépare ?... Vous avez eu raison, car nous approchons de la fin... Entrez. ...Exeusez-moi, madame, mais je dois vous enlever votre sac... La consigne est formelle. Et le petit monsieur va quitter son béret... Il sera sage... Quel âge a-t-il ?... Sept ans ! C’est l'âge de raison. 1! sera raisonnable, même ici, où on l’est si peu... Je comprends que ces formalités vous surprennent, mais si vous sa viez ce que nous sommes embêtés par la ques ture et la direction du personnel ! Il est vrai que, depuis quelque temps, c’est à qui jettera quelque chose dans l’hémicycle... Les anciens combattants, les agraires, les contribuables, les suffragettes se sont donné le mot, c'est pas possible !... Ce qu’ils peuvent jeter comme tracts, prospectus, manifestes ! C’est à croire qu’ils prennent la Chambre pour une poubelle... Alors, qu’est-ce qui se fait attraper, c'est nous.. ...Ne riez pas, madame. Le métier d’huissier n’est pas toujours drôle. Je fais mon métier consciencieusement, comme vous le voyez... Rien dans les mains, telle est ma consigne... Mais est-ce que je peux prévoir qu’un de mes clients va se mettre a enguirlander le prési dent du Conseil et les ministres du haut de la tribune du public ?... C’est pourtant ce qui est arrivé à la fin de la session dernière. L’in dividu a été condamné, mais ça me fait une belle jambe, vous pensez !... On m'a dit : « Vous auriez dû le surveiller ». Je ne peux pourtant pas être derrière mes clients et leur mettre la main sur la bouche quand ils veu lent l’ouvrir à leur tour... ...Et puis, entre nous, ce qu’il a dit à M. La val était infiniment plus gentil que ce que lui disent beaucoup de ces messieurs de l'extrèmegauche. Mais voilà, il n’était qu’électeur... LTne vieille fille ...Oui, celle-là, je la retiens... Elle n’était pas dans mon secteur, heureusement. Mais ça n’a pas été drôle pour mon collègue. Il avait fait comme moi avec vous : pas de canne, pas de parapluie, pas de paquet, pas de sac. Il pen sait : en voilà une au moins qui ne jettera rien... ...Ah ! les femmes, tout de même !... Ce qu’elles vont imaginer. N’ayant rien A jeter dans l'hémicycle, elle s’y est jetée elle-même... Elle est tombée sans faire mal à aucun de ces messieurs. Il paraît qu’elle voulait pro tester contre l’indifférence de la Chambre de vant le problème de la dénatalité... Elle vou drait qu'il y ait plus d'enfants en France. C’est une vieille fille, et elle est allée s'asseoir à côté de M. Alexandre Varenne. C’est une femme à barbe, probablement. Je veux dire que c’est une femme qui aime les hommes à barbe. Car, en fait de barb;, qu’est-ce qu’il tient, le Varenne !... Premières déceptions ...Mais je m’aperçois que je bavarde, que je bavarde, alors que vous avez hâte d'entrer et d'observer. Ça ne va pas être très drôle pour le petit jeune homme, mais ça va lui faire le caractère... Justement, nous manquons de rigo los. Uhry, qui amusait tant les enfants, ne vient presque plus... Il est malade... Ah ! il était impayable, celui-là, avec sa petite tête pointue, ses petits bras courts, ses petites...
À propos
Anticommuniste, profasciste, antisémite et positivement favorable à Hitler, Je suis partout est le journal d’extrême-droite le plus violent jamais publié en France. Si violent que son directeur Arthème Fayard, fondateur des éditions Fayard, décide dès mai 1936 de cesser sa parution. À sa mort en novembre 1936, le journal est toutefois relancé par son fils et Pierre Gaxotte, futur membre de l’Académie Française.
En savoir plus Données de classification - dautry
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