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Journal de la ville de Saint-Quentin et de l’arrondissement, 21 juin 1849

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Journal de la ville de Saint-Quentin et de l’arrondissement
21 juin 1849


Extrait du journal

APRÈS LA VICTOIRE. Le triomphe de l’ordre sur l’anarchie au 13 juin, a ce carac tère particulier d’avoir été obtenu, sans de notables sacrifices, sur les forces coalisées de l’esprit révolutionnaire ; les hommes du National coudoyaient les disciples de M. Proudhon, dans cette manifestation soi-disant pacifique, qui voulait rejouer la partie perdue au 15 mai 1848 ; et le drapeau des Amis de la Constitution , aussi bien que celui de la république démocrati que et sociale, a fui presque sans combat devant le drapeau de l’ordre. En face de la souveraineté de la majorité, le triomphe est d autant plus complet que le ridicule, plus encore qu’un im mense déploiement de forces a moralement tué l’insurrection dans son germe, et la société a devant elle quelques mois de complète tranquillité pour se reconnaître, mesurer la profon deur de l’abîme ou elle est descendue depuis quinze mois, et tout le chemin qui lui reste à parcourir pour n’avoir devant elle que le calme horison du véritable progrès, du progrès dans l’ordre et dans la légalité. Tous les hommes de février ont disparu un à un devant le dé dain populaire, ou bien ils sont tombés sous le coup de la vindicte des lois. Le terrain est donc, de ce côté, à peu près complète ment déblayé, et la société s’appartient elle-même. Dans cette conquête que l’ordre a fait depuis un an sur le désordre ; la lé galité la plus scrupuleuse a été observée, et, grâce au ciel, il ne nous en a pas coûté une seule goutte de sang pour rejeter dans une obscurité dont ils n’auraient jamais dû sortir, tous ces hommes qui aspiraient à gouverner la France par le droit du plus fort, par le droit d’un coup de main heureux. La majorité peut juger de sa puissance, quand elle ne veut pas s’abandonner elle-même ; elle peut juger de tout ce qu’elle pourra dans l'avenir, sans sortir un seul instant de la plus stricte, de la plus scrupuleuse légalité. En suivant avec persé vérance cette voie de franchise et de respect pour la loi, elle contribuera puissamment à perfectionner notre éducation poli tique, à éloigner dans l’avenir de nouvelles secousses révolu tionnaires auxquelles, dans le passé, nous ne devons aucun vé ritable progrès. Dans le présent, que la majorité soit modérée dans sa vic toire , et qu’elle n’en profite que pour fortifier le pouvoir con tre les tentatives démagogiques de la minorité, que pour résou dre pacifiquement le problème important de l’amélioration du sort des classes ouvrières. La violence, après la victoire, serait une preuve de faiblesse avidement recueillie par les vaincus du 13 juin. Que la majorité hâte le moment où l’état de siège pourra être levé, où les jour naux hostiles pourront reparaître comme par le passé ; tout re tard inutile pose les intéressés en victimes ; n’aidons pas à leur tresser des couronnes de martyrs. Que l’on se reporte au mois de juin 1848, à l’époque de la dictature du général Cavaignac ; qu’avons-nous dit et pensé de cette prolongation indéfinie de l’état de siège ? Qu’avons-nous dit et pensé de la brutale sus pension de Y Assemblée nationale, de la Presse, de la Gazette de France ? de cette atteinte injustifiable à la liberté individuelle dans la personne de M. Emile de Girardin ? Tâchons de nous inspirer des mêmes sentimens. Les circons tances , sans doute, ne sont plus les mêmes ; les journaux sup primés à cette époque n’avaient pas, comme le Peuple , la Ré forme et les autres, donné le signal de l’insurrection ; M. de Gi rardin était plus innocent de la prise d’armes du 23 juin 1848 que ne l’ont été de l’émeute avortée du 13 juin , les écrivains qui prêchaient tous les jours depuis un mois dans leurs feuilles incendiaires, la déchéance des autorités constituées. Malgré les différences capitales entre les deux époques, les impressions du parti modéré en 1848, pourront le guider dans la conduite qu’il convient de tenir aujourd’hui. Calme dans sa force, que le pou voir fasse exécuter les lois. Cela suffit à sauvegarder le présent, à rassurer l’avenir. L’autorité a été désarmée contre les attaques journalières des clubs et de la presse ; la justice est lente à punir les délits et les crimes commis par les citoyens dans l’exercice du droit de réunion et du droit d'exprimer ses opinions. Que le pouvoir présente de nouvelles lois pour frapper avec plus d’énergie tout mensonge, toute calomnie, toute insulte contre l’autorité éta blie. Les lois répressives doivent être sévères ; l’ordre l’exige ; leur sévérité, parfaitement compatible avec la Constitution, et que le jury peut toujours modérer au gré de ses impressions , rendra inutiles les lois préventives vers lesquelles on penche trop facilement en f rance. Le ministère propose d’interdire les clubs pendant un an, que la majorité ne montre pas plus d’exi gences que le pouvoir ; en un an, elle peut, par d’utiles insti tutions, décimer les rangs des assidus auditeurs des clubs anar chiques. C’est par l’initiative généreuse prise par la majorité d’institu tions de prévoyance et de crédit, que l’on parviendra plus sû rement à apaiser cette effervescence immodérée de passions mauvaises et d’idées irraisonnables, qui fait le seul danger de notre époque. Déjà, d’utiles projets de loi sont à l’étude ; que l’on se hâte, et que la bonne volonté de nos représentans ne vienne pas ex pirer dans le travail des bureaux. Qu’à ces projets de loi, le ministère ou l’initiative parlementaire en ajoutent incessamment d’autres. Nous ne ferions que copier tout ce que les nations étrangères, plus heureuses que nous, ont déjà fait dans cette voie d’amélioration et de progrès, que nous aurions beaucoup fait pour l’apaisement des esprits et la consolidation de l’ordre. Généralisons les utiles institutions déjà existantes parmi nous ; profitons de l’expérience de nos voisins ; soyons indulgens pour les projets qui, émanés d’un bon sentiment, peuvent renfermer le germe d’une idée utile , et cette défiance réciproque qui sé...

À propos

Fondé en 1819, Le Journal de la ville de Saint Quentin publie les annonces judiciaires de son département sans le concours du gouvernement. L’initiative porte ses fruits puisque la publication du journal demeure assurée jusqu’en 1914.

 
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