Extrait du journal

Deux repas par jour suffisent, pourvu qu'ils soient copieux. C'est le régime de plusieurs corps d'état, notamment du bar reau et de la magistrature. Une alimenta tion ingérée de bonne heure laisse l'esprit plus libre, le corps plus léger et plus sou-, pie ; elle stimule la verve de l'avocat et tient le juge en éveil. Nul doute que ce ré gime ne soit favorable au travail; on s'ap plique d'autant mieux qu'on étudie sans hâte, ayant devant soi de longues heures. Il n'a d'inconvénients que pour ces malades plus nombreux qu'on ne pense, à qui l'état de leur santé déconseille le travail dans l'intervalle des repas.' Adopter le nouveau régime, c'est prati quement supprimer le déjeuner en ville. Ou ne voit guère l'invité se hâtant de quit ter sa demeure avant l'aube pour arri ver exactement chez son amphitryon. On voit encore moins là maîtresse de maison habillée à cette heure matinale et prête à recevoir les convives dans un appartement où le ménage est fait. Il faut regretter le déjeuner de midi. 11 avait de grands mé rites. Moins cérémonieux que le repas du soir, il offrait l'avantage de durer moins longtemps. Sur le coup de deux heures, le prétexte d'une affaire urgente permettait de prendre congé ; la discrétion en luisait même un devoir, car une affaire urgente appelait aussi dehors la personne qui re cevait. Lé soir est moins propice à ces in nocents subterfuges ; 011 11e peut invoquer que le dernier métro pour abréger des joies qui paraissent longues; passé dix "heures, la politesse engage à attendre les approches de minuit pour présenter ses devoirs et à retarder le moment où, en fermant la porte, deux voix lasses diront : « Enfin, seuls ! »...