Extrait du journal
La décision des socialistes a provoqué à la Chambre.une réelle émotion. Beaucoup de députés se demandent si les voyageurs pour Stockholm obtiendront leurs passe ports et émettent l'avis que le gouverne ment devrait ■ lés Tétir refuser. Car, en dépit de toutes les précautions oratoires, nos délégués socialistes vont à Stockholm non pas pour y rencontrer seulement leurs camarades russes, mais pour y prendre contact plus ou moins directement avec d'autres camarades chargés de défendre des intérêts qui ne sont pas précisément lés nôtres, ni ceux de nos alliés, ni même ceux de la démocratie universelle. Nul ne .reproche aux socialistes allemands de se mettre au service de leur pays et de travailler par tous les moyens dont ils disposent à le tirer du mauvais pas où l'impérialisme militariste l'a en gagé, avec leur assentiment d'ailleurs. C'est leur droit, et ils considèrent même que c'est leur devoir, mais l'opinion pu blique en France a aussi ses droits et ses devoirs, dont on semble parfois faire trop bon marché. Le mauvais effet produit à la Chambre et dans le pays par la décision du parti socialiste est tout naturel et l'i dée de ne pas accorder de passeports pour l'étranger à des postulants dont le vôyage a un but aussi peu mystérieux se présente tout de suite à l'esprit. Alors que tout commerce, mêmeprivé, est légalement interdit avec l'ennemi, comment autoriser une sorte do négociation diplomatique au nom d'un parti politique? Quand la France négociera, ce ne sera pas la France d'un parti. La question, au surplus, ne nous con cerne pas seuls ; elle se pose d'une façon identique devant tous les gouvernements en guerre contre l'Allemagne, et il y au rait avantage à les voir adopter tous la même altitude. Tous éprouvent assuré ment la même impression que nous. Les Etats-Cnis ont déjà annoncé leur ferme propos de ne pas se prêter au pèlerinage de.Stockholm. Un accord de vues et de conduite entre les Etats intéressés ferait une forte impression, et nous ne doutons pas qu'ils ne comprennent l'avantage de se concerter à ce sujet et d'agir comme sur un seul.front. L'essentiel est en effet d'éviter les flot tements, les incertitudes et les contradic tions qui ont trop souvent énervé ou para lysé notre action. Il faut, chez nous d'abord et avant tout, savoir ce qu'on, veut et ensuite le vouloir irrévocablement. On ne soupçonne pas à quel degré le pays souffre moralement autant que matériellement toutes les fois qu'il a l'impression de n'être pas gouverné. Il ne demande qu'à suivre, qu'à approuver, qu'à applaudir, à condition qu'on le dirige. Il a confiance en qui a confiance dans l'action. Ce qui le déroute, c'est la faiblesse. Il ne s'explique pas, par exemple, la mansuétude dont nos pouvoirs publics font preuve en face des désordres dans la rue, désordres en fantins, nous ne l'ignorons pas, mais l'heure n'est pas aux enfantillages. Les revendications des midinettes de tout or dre ne scandalisent personne,mais le scan dale commence quand commencent les manifestations tumultueuses, conduites par des étrangers plus que suspects, qui n'ont rien à voir dans des revendications féminines et dont la présence en France n'est sùremenlpas autorisée pour de telles occupations. Un agent cité comme témoin indiquait hier que, sur seize grévistes ar rêtés, neuf étaient des étrangers. Voilà une petite statistique qui mériterait les honneurs de l'affichage. Elle ferait plus d'effet que les adjurations creuses et va gues qu'on multiplie à la tribune ou dans les journaux. Est-il tolérable que les choses conti nuent ainsi? Bienvenus chez nous sont et resteront les étrangers qui viennent y ga gner leur vie en travaillant de leur métier. Mais cette tourbe louche qui flotte comme une écume à la surface des moindres agi tations ne mérite aucun égard. Quelle besogne accomplissent, de quelles res sources vivent ces aventuriers dont l'état civil n'est pas moins douteux que la situa tion sociale? L'autr# jour, on ramassait dans une bagarre un Egyptien, naturalisé Persan, et muni d'un passeport d'Armé nien. Le public, en son bon sens robuste et sain, remarque ces petits faits, en tire des conclusions. 11 ne faut pas les lui laisser pour comple. Du haut en bas, il faut que l'autorité fasse sou devoir et le fasse tout entier....
À propos
Fondé en 1789 sous le titre Journal des débats et décrets, le Journal des débats politiques et littéraires retranscrit, dans un premier temps, la quasi intégralité des séances dispensées à l’Assemblée Nationale. Sous Napoléon, il change de nom pour devenir le Journal de l’Empire. Publié jusqu’à l’Occupation, le journal sera supprimé en 1944.
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