Extrait du journal
Les garçons coiffeurs l'ont école. Voilà maintenant les employés de l'alimentation qui se réunissent par bandes et font le sac des bureaux de placement. Nos lecteurs trou veront plus loin le récit de leurs exploits. Il ne s'agit pas, on le verra, d'une grève, mais simplement de manifestations organi sées par des ouvriers momentanément réduits au chômage. Tous les ans, à pareille époque, commence pour les garçons restaurateurs et limonadiers la morte-saison. Pendant les mois d'été, alors que Paris est délaissé par la classe aisée, l'absence de dîners, de noces et de soirées produit nécessairement une suspension par tielle du travail. Ce phénomène est régulier ; il se reproduit à époque fixe avec plus ou moins d'intensité selon les saisons. Il peut se faire que, cette année, par suite de la rigueur ex ceptionnelle de la température, le chômage soit plus général. Beaucoup de garçons, qui comptaient se faire embaucher comme « ex tras'»par les restaurateurs de la banlieue, n'ont pas dû trouver, en effet, d'emploi. Mais cette circonstance ne suffit pas à expliquer l'agita tion inusitée de cette partie de la population. D'où vient que les corps d'état, habitués à des chômages périodiques revenant à des époques déterminées, trouvent intolérable une situation qu'ils avaient jusqu'à présent acceptée tant bien que mal ? C'est qu'ils ont pris goût aux manifestations bruyantes de la rue et que, au lieu de chercher à s'occuper ou de rester chez eux ou de pêcher à la ligne, selon la tradition parisienne, les ouvriers en chômage ont trouvé beaucoup moins monotone de s'agiter, de manifester et d'in quiéter les gens dont ils croient avoir à se plaindre. Ils ont timidement tâté l'autorité ; quand ils ont vu qu'ils n'avaient pas à redou ter de répression bien sérieuse, ils sont allés plus avant. Et puis le centre de ralliement leur manquait : où se rencontrer, où se concerter ? Grévistes et ouvriers sans em ploi ont aujourd'hui la Bourse du travail qui, à toute heure du jour et de la soirée, leur offre une inviolable hospitalité. Là on se retrouve, on s'excite en parlant, ou s'échauffe l'imagination, et, l'éloquence de M. Vaillant aidant, on s'en va par les rues à la recherche des exploiteurs à corriger et des capitalistes à faire rentrer sous terre. Aujourd'hui, ce sont les garçons limonadiers en chômage qui en-" combrent la voie publique et troublent la tranquillité par leurs cris et leurs voies de fait. Demain, il faut s'attendre à voir les autres corporations atteintes par le chô mage périodique se livrer aux mômes mani festations. Cela nous promet une perspective findéfinie de. scènes tumultueuses qui pour raient bien, du train où vont les choses, ne pas se dénouer toujours pacifiquement. A ce point de vue les manifestations organisées par les ouvriers inoccupés ont une portée plus inquiétante que les manifestations des grévistes, et elles pourraient avoir des consé quences plus graves. Dans tous les cas, elles sont encore moins justifiées et elles ne sauraient être tolérées....
À propos
Fondé en 1789 sous le titre Journal des débats et décrets, le Journal des débats politiques et littéraires retranscrit, dans un premier temps, la quasi intégralité des séances dispensées à l’Assemblée Nationale. Sous Napoléon, il change de nom pour devenir le Journal de l’Empire. Publié jusqu’à l’Occupation, le journal sera supprimé en 1944.
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