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Journal des débats politiques et littéraires, 19 mai 1844

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Journal des débats politiques et littéraires
19 mai 1844


Extrait du journal

qui, formés tard, prennent à trente ans un embonpoint inattendu. Ce jeune hommé eût assez bien représenté, pour les gens à qui l'histoire de France est familière, la royale et incon cevable figure de Louis XIIL, mélancolique modestie, sans cause connue, pâle sous la couronne, aimant les fatigues de la chasse et haïssant le travail , timide avec sa maîtresse au point de la respecter, indifférent jusqu'à laisser tran cher la tête à son ami, que le remords d'avoir vengé son père sur «a mère peut seul expliquer : ou l'Hamlet catho lique ou quelque maladie incurable. Mais le ver rongeur qui blêmissait Louis XIII et détendait sa force, était alors, chez Ernest, simple défiance de soi-même, la timidité de l'homme à qui nulle femme n'a dit : Comme je t'aime ! et surtout le dévouement inutile. Après avoir entendu le glas d'une monarchie dans la chute d'un ministère, ce pauvre garçon avait trouvé dans Canalis un rocher caché sous d'élégantes mousses; il cherchait donc une domination à aimer. Cesnuages, cessentimens,cetteteintede souffrance répandue sur cette physionomie la rendaient beaucoup plus belle que ne le croyait le Référendaire, assez fâché de s'en tendre classer par les femmes dans le genre des Beaux-Té nébreux; genre passé de mode par un temps où chacun voudrait pouvoir garder pour lui seul les trompettes de l'Annonce. Le défiant Ernest avait donc demandé tous ses prestiges au vêtement alors à la mode. Il mit pour celte entrevue, où tout dépendait du premier regard, un pantalon noir et des bottes soigneusement cirées , un gilet couleur soufre qui laissait voir une chemise d'une finesse remarquable et boutonnée d'opale, une .cravate noire, une petite redingote bleue ornée de la rosette et qui semblait collée sur le dos et à la taille par un procédé miraculeux. Portant de jolis gants de chevreau, couleur bronze florentin, il tenait de la main gauche une petite canne et son chapeau par un geste assez Louit-Quatorzien , montrant ainsi, comme le lieu l'exigeait, sa chevelure massée avec art, et où la lumière produisit des luisans satinés. Campé dès le commencement de la messe sous le porche, il examina l'église en regardant tous les chrétiens , mais plus particulièrement les chré tiennes qui trempaient leurs doigts dans l'eau sainte. Une voix intérieure cria : Le voilà! à Modeste quand elle arriva. Cette redingote et cette tournure essentiellement parisiennes, cette rosette , ces gants, cette canne, le par fum des cheveux, rien n'était du Havre. Aussi, quand La Brière se retourna pour examiner la grande et fière nota resse, le petit notaire et le paquet expression consacrée en tre femmes), sous la forme duquel Modeste s'était mise, la pauvre enfant, quoique bien préparée, reçut-elle un coup violent ad cœur en voyant cette poétique figure illuminée en plein par le jour de la porte. Elle ne pouvait pas se tromper : une petite rose blanche cachait presque la r

À propos

Fondé en 1789 sous le titre Journal des débats et décrets, le Journal des débats politiques et littéraires retranscrit, dans un premier temps, la quasi intégralité des séances dispensées à l’Assemblée Nationale. Sous Napoléon, il change de nom pour devenir le Journal de l’Empire. Publié jusqu’à l’Occupation, le journal sera supprimé en 1944.

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