Extrait du journal

La date des élections. Le bruit s'est répandu hier, dans les couloirs de la Chambre, et il a été re cueilli par là presse, que le pouvoir irresponsable qui, sous le nom do Délégation des Gauches, exerce l'autorité gouvernementale dans ce pays, aurait ré solu de fixer les élections générales à la date du 8 avril. Les ministres auraient été mis au courant, et n'auraient pas refusé d'obtempérer à ce désir, sans toutefois manifester beaucoup d'empressement. Il reste a consulter M. Fallières, qui ne peut pas donner son opinion avant le 18 février; il reste aussi à savoir à quelle époque la Chambre aura terminé la discussion du budget, et l'on vient de s'apercevoir avec stupéfaction qu'elle n'en était qu'au début de sa tâche, et qu'il était peu vraisem blable qu'elle l'eût achevée avant deux mois. Nous ne croyons pas avoir besoin de dire à quril degré la question nous est indifférente. L'Assemblée qui va mourir laissera trop peu de regrets pour que le besoin se fasse sentir de prolonger ses jours, et il est évidenj qu'une consultation du suffrage universel peut seule mettre un terme, dans un sens ou dans l'autre, à l'état d'agitation, de malaise et d'instabi lité dans lequel nous vivons. Nous attendons, de cette consultation, une sorte do libération politique, et, dès à présent, nous sommes disposés à l'affron ter. Nos positions sont prises et nos candidats sont prêts. Que le Bloc, en vérité, ne se gêne pas pour nous! Nous ne pouvons pas nous empêcher, cependant, de remarquer que le motif qu'il invoque à .l'appui do son désir est assez risible. II perçoit que les socia listes unifiés ont l'intention de faire quelques mau vaises manières le ler1er Mai de cette année. On re doute que la bourgeoisie radicale en soit défavora blement impressionnée, et on tient pour nécessaire quo les opérations du scrutin se terminent avant l'heure où la confédération du travail se livrera à ses tapageuses excentricités. Les radicaux veulent bien s'allier aux socialistes pour essayer de garderie pouvoir; mais ils savent en même temps que leurs al liés ne sont pas présentables, et ils voudraient bien ne pas avoir à les présenter avant de les avoir fait élire. Si par malheur ils avaient saccagé quelques usines avant le ballottage, il serait peut-être diffi cile à l'Alliance républicaine démocratique de les représenter comme les candidats « du travail, dq progrès et do la paix > ; et les électeurs, en tout cas, conserveraient des doutes. Il y a parfois, dans les familles où un mariage se prépare, des parents pauvres ou mal élevés, qu'on cherche à dissimuler jusqu'à la cérémonie, et qu'on no révèle que lors que l'irréparable est accompli. Les socialistes sont, pour les radicaux, ces parents là. On a peur que, s'ils vont dans le monde, ils fassent manquer le mariage, et c'est pour cela, paraît-il, qu'il faut en avancer l'heure....