Extrait du journal

I Deux hommes se tenaient Assis près d’une haute cheminée. Sur l’établi qui les séparait s'entassaient des outils de formes diverses et des morceaux de bois naïve ment sculptés. Bien que l’on fût déjà dans la seconde quinzaine d’avril, la soirée était fraîche, et les travailleurs jetaient de temps en temps dans l'Aire des copeaux de hêtre et des brassées de bois mort. Ils conti nuaient leur tâche en silence : le plus vieux terminait une paire de sabots, le plus jeune gravait en creux les arabesques d’une boite à sel, mêlant, avec un art inné, les oiseaux elles fleurs dans un chif fre gothique. Parfois l'outil tombait des mains du jeune homme ; il regardait de vant lui sans voir, cherchant dans les cendres rouges et les brindilles enflam mées une image poursuivie. Quand le vieillard le surprenait ainsi, il secouait la lê:e avec découragement ; enfin, n’en pou vant plus, il posa sur l’établi le sabot à demi creusé et demanda : — Marcel, ne me confieras-tu jamais le sujet de U peine? — Mon père, répondit le jeune homme d’une voix respectueuse et triste, mes son geries ne vous intéresseraient guère. De puis mon enfance vous me voyez replié en moi. Jamais, je le sais, tu n’as montré de goût pour les divertissements bruyants et les fêtes du pays; mais autrefois tu ne semblais pas craindre de causer avec ton père......