Extrait du journal

Le trouble et l’agitation de Marianne avaient été si vifs, tant de sentiments tu multueux s’étaient éveillés en elle lors qu’elle entendit le vicomte confirmer son espoir, qu’elle avait été prise comme d’un vertige et quelle était demeurée un instant sans pensée et sans voix. Mais elle retrouva la parole en voyant son père s’humilier devant elle, et toute rougissante, pour elle autant que pour lui : — Ne dites pas cela ! s’écria-t-elle vive ment. Est-ce qu’une fille a le droit de ju ger son père Y Ne sais-je pas d'ailleurs que vos erreurs, si vous en avez commis, vous les avez cruellement expiées? Non, mon père, pour vous aimer, je n’aurai rien à oublier, rien à vous pardonner non plus. Je ne veux me souvenir d’ailleurs que de l’inquiétude avec laquelle vous me cherchiez et de votre empressement à venir, dès que vous m’avez eu retrouvée l Touché malgré lui d’un si généreux pardon, le vicomte lui saisit la main, et l’attirant dans ses bras : — Ah! chère enfant, dit-il en l’y ser rant avec tendresse, si vous saviez quel bien me fout vos paroles ! Elles apaisent tant de regrets ! — Et si j’avais à me plaindre, reprit doucement Marianne, ce ne serait pas de vous, mon père, mais des tristes dissenti ments qui sépavent deux êtres qui me sont si chers, et qui font que je ne puis retrouver l’un sans craindre de perdre l’autre. — Marianne ! s’écria le vicomte d’un ton de reproche affectueux. —Ne vous méprenez pas sur mes inten tions, mon père, répliqua vivement la jeune fille. Je vous dois obéissance, je le sais, et si vous m’ordonniez de vous suivre, je n’hé siterais pas. Mais cet homme généreux qui, depuis des années, a sacrifié sa vie à la mienne, et dont la tendresse m’a protégée I comme l’eût fait celle d’une mère, puis-je...