Extrait du journal
Quand le Rhône devient français il n’est pas encore le fleuve rapide, mais majestueux dont les apports de la Saône ont grossi la masse et régularisé le débit, mais le torrent dévastateur issu des Alpes. Il a creusé dans les chaînons méri dionaux du Jura une vallée étroite, réduite parfois à un sauvage défilé où ses eaux bouillonnantes descendent aveo une vitesse considérable sur une pente fortement inclinée. En amont de Bellegarde, sur une longueur de22 kilomètres à peu près, la différence de niveau atteint 65 mètres. Grâce à l'inépuisable réserve qui constitue pour le Rhône son glacier, et au régulateur qu'est le lac de Genève, a quantité d’eau transportée par le fleuve à son entrée en France, même au temps où la sécheresse tarit ses affluents, reste toujours très importante. Rien d’étonnant à ce qu’on ait songé & utiliser pour une vaste entreprise indus trielle les ressources en houille blanche, qu’en cet endroit la nature promet de renouveler indéfiniment. Un proverbe anglais dit : « Donnez assez d’argent à un ingénieur et il fera tout ce que vous voudrez. » Moyennant que cette condi tion soit remplie, les ingénieurs offrent aujourd’hui de faire servir l’énergie élec trique créée aux environs de Bellegarde à l’alimentation de Paris en lumière,chauffage, travail On construirait un barrage à la hauteur du village de GresiB. Etant donné le resserrement de la vallée dans cette partie du cours, les eaux ainsi retenues n’envahirai en t[comme terrain utilisable que la petite plaine de Collonges : elles constitueraient là une réserve de 2 millions de mètres cubes qui permettraient d’augmenter notable ment le volume d’eau passant par l’usine aux époques où le débit du Rhône est réduit. Ce débit pourrait être capté sans inconvénient et restitué au fleuve àMontoux par un tunnel de 4 500 mètres en une chute qui variera entre 67m,25 et 64 mètres, suivant les saisons. Grâce à la hauteur de cette chute, au volume de ses eaux, grâce aussi au voisinage du lac du Bourget qui, au besoin, pourra fournir son tribut, on espère pouvoir créer dans la région de Bellegarde une usine hydro-électrique d’une puissance de 150 000 chevaux. Il y aura là de quoi satisfaire largement aux besoins de la région parisienne, besoins qu’on évalué au maximum à 100000 chevaux. Le trans port de l’énergie produite sur les rives du Rhône se ferait au moyen de deux fils conducteurs, doublement qui per mettrait, durant les heures de faible consommation, de ne laisser qu’nne ligne en service pour vérifier ou réparer l’autre. L’adoption de ce système aurait, en outre, l’ayantage de diminuer singu lièrement la force de la seule objection sérieuse qui ait été faite au projet, à savoir l’insécurité bu, tout au moins . l’éventualité d’une suspension dans la transmission ducûurantdue à des causes fortuites, à la malveillance et surtout aux dangers de guerre. Quant aux autres impossibilités dont on a tiré argument contre l’entreprise, elles ne résistent pas à l’observation. On sait que le courant électrique subit des déperditions notables quand il est trans porté assez loin de l’usine de produc tion: la perte subie “sera d’autant plus grande que le conducteur sera plus long et plus mince, il en résulte que si on veut augmenter la distance de trans mission, il faudra aussi augmenter la section de ce conducteur et son poids. Mais comme le métal employé pour porter le courant d’un point à un autre, le cuivre, coûte fort cher, on se heurte rait à des difficultés d’ordre financier pour exécuter un projet qui nécessiterait 8 ou 900 kilomètres de fils. La science a trouvé le moyen de- simplifier le pro blème en élevant la tension, ou pour employer un terme plus simple, la pres sion du courant transmis: cette forte pression oblige le courant à passer plus facilement, en subissant de moindres déperditions, dans les canalisations qui sont pourtant assez petites et dont le volume, le poids, le prix d’acquisition sont considérablement réduits. D’ailleurs, la pratique d’expériences faites avec succès vient confirmer les données de la théorie : en France même, nous avons des distributions d’électri cité à grande distance; telles celle d’Avignonnêtdans l’Isère,qui franchit 150 kilo mètres pour atteindre la région lyon naise; celle de l’usine de la Volta, à Lyon, sur 180 kilomètres. Si nous pas sons à l’étranger, nous trouverons d’au tres exemples dans les installations de Colgate, àSan-Francisco (358 kilomètres), de Lauffen, à Francfort (175 kilomètres). Les ingénieurs ne craignent pas d’abôrder des transports plus lointains encore: une entreprise suédoise étudie l’alimentalion de Stockholm par une ligne de 600 kilomètres, et même une Compagnie se prépare à livrer aux mines transvaaliennes du Rand, l’énergie recueillie »us chutes Victoria, sur le Zambèze, à la...
À propos
La Croix est un journal catholique conservateur créé par Emmanuel d’Alzon, prêtre de la Congrégation des assomptionnistes, en 1880. Quotidien depuis 1883, il continue d'être publié de nos jours, dans une version bien moins partisane et religieuse que par le passé.
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