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La Croix, 29 novembre 1902

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La Croix
29 novembre 1902


Extrait du journal

Voilà donc la grève générale des mi neurs terminée ou à peu près. Les hommes du fond ont remis le pied dans la cage. Ils ont repris le pic et la lampe et recommencé leur sombre trouée dans les entrailles du sol. Joyeux, le cœur soulagé d’un poids immense, les gendarmes, réquisitionnés de tous les points de la France, sont re tournés chez eux. Finis les beaux jours pour les cambrioleurs, truands et malan drins ! Et nos braves pioupious, dont la tenue U été si parfaite malgré les provocations exaspérantes, ou les invitations à l’indiseipline, ont regagné leurs chambrées où l’austère polochon leur a semblé doux après ces nuits froides passées à la belle étoile et dans des casernements impro visés. C’est fini, oui; mais est-ce tout? Cet apaisement est-il une solution? Non. Le douloureux et désastreux incident est clos, mais la question reste entière. C’est avec le cœur ulcéré de haines et de rancunes que nos mineurs ont repris le chemin de la fosse. Ceux qui ont voulu la grève et ceux qui l’ont subie voient égalementle spectre de la misère installé à leur foyer. II fau dra en remplir des bennes pour faire taire les dettes criardes! Et tous ont emporté à mille pieds sous terre la révoltante conviction qu’ils ont été « roulés ». Roulés, les uns par la violence de leurs frères excités contre eux, les autres par la perfidie de leurs mauvais bergers. En certains milieux, le public a trouvé trop d’indulgence dans les paroles pro noncées à la tribune et le langage tenu ici même en faveur de l’amnistie pour faits de grève. C’est qu’on ne connaît pas assez la situation vraie faite aux pauvres mi neurs par les misérables dont la spécia lité est de les troubler pour pêcher des mandats et assouvir d’inavouables am bitions. Les mineurs, pour la plupart, ne sont ni mauvais ni paresseux. Ils aiment leur métier et ils s’aiment entre eux. Seulement ils sentent que tout n’est pas juste dans le sort qui leur est fait. Les Compagnies sont des organismes créés avant tout pour gagner de l’argent, et le zèle intéressé de leurs agents les porte naturellement à tirer du mineur tout le rendement possible. Voilà donc des intérêts concurrents et qu’il s’agit de concilier. Or, au lieu de travailler à cette conci liation et à l’entente nécessaire pour le plus grand bien des deux parties, les gréviculteurs qui interviennent ont l’unique souci de se créer une popularité qui sera le point de départ d’une fortune politique. Ils sont une nuée, ces parasites de haut et de bas étage se ruant à cette curée. Et ils emploient pour réussir le moj en le plus aisé et le plus sûr : ils trompent le mineur, ils l’excitent, ils l’exaltent, ils exagèrent les justes motifs de plainte, ils en inventent de faux, ils outrent les promesses, ils grisent ces âmes con fiantes des larges lampées de leur élo quence menteuse et haineuse. Gomment voulez-vous que le gros des mineurs qui n’entendent jamais quecette cloche — qui est un tocsin —se défendent contre les entraînements? Os subissent le charme de cette griserie, ils croient que « c’est arrivé », et, avec une foi aveugle, se mettent à la suite de leurs perfides meneurs. Et quand, à côté d’eux, des camarades plus avisés, plus réfléchis et plus indé pendants, refusent de marcher, se mettent à réagir et, secouant résolument...

À propos

La Croix est un journal catholique conservateur créé par Emmanuel d’Alzon, prêtre de la Congrégation des assomptionnistes, en 1880. Quotidien depuis 1883, il continue d'être publié de nos jours, dans une version bien moins partisane et religieuse que par le passé.

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