PRÉCÉDENT

La Libre Parole, 2 mars 1910

SUIVANT

URL invalide

La Libre Parole
2 mars 1910


Extrait du journal

Voulez-vous une leçon de choses, venue à propos, pour démontrer le ra vage que produit en bas l'impunité d’en haut ? Alors, prenez la peine de lire dans les journaux ce qui s'y publie, sous ces rubriques : Les Scandales de la Marine, ou Les scandales de Toulon, ou encore Les fraudes des fournis seurs de la Marine, etc. N ous y verrez que, faute d’avoir en bonne justice, châtié, comme il fallait le faire, les ministres, les grands ingé nieurs, les gros fournisseurs et les notables pots-de-viniers de la Marine, les petits se sont enhardis à les imiter. A vrai dire, il n’y a encore qu'en petit nombre ce qu'on appelle des do cuments, mais le peu qu’on en a lais sé passer, pour amorcer les mesures de police, peut déjà suffire à nous fixer sur les milieux où la corruption a pé nétré. Ce sont maintenant des milieux as sez modestes ; la condition sociale des inculpés et des suspects ne dépasse guère celle des moyens commerçants et des moyens employés. Les pots de vin distribues sont à peine des petits verres, mais on en a distribué tout de môme. De l’une des lettres saisies et pu bliées, datée depuis 1007, j’extrais, à eet égard, ce passage significatif, qui donne assez bien la mesure : Mon ami, qui vous réserve pour ainsi dire toutes les affaires, n'est nullement satisfait de vos commissions supplémentaires. Pour la commande de charbon n° 1708, s’é levant à 431 francs, vous lui allouez 2U Ir., tandis que c’est du 15 % qu’une autre mai son lui aurait remis et est prête à lui re mettre pour les autres commandes. Je sens que cet indicateur me glisse entre les doigts si je ne puis mieux le rémunérer. On le voit, il ne s’agit pas ici de I ces affaires de millions qui se brassent j à Paris, entre Juifs de Marine ou Juifs de Guerre, ou Juifs d’entreprises. Il s agit d'une petite commande de 431 ! francs, sur laquelle on alloue 20 francs | à l’employé indicateur. C’est presque une affaire de ménage et d’anse du pa nier. De même, dans une autre lettre, en date du 12 septembre 1907. je cueille ce passage : M. T... n’a pas encore iait son rapport. Vous en aurez la copie, ce qui vous coûtera un louis. J’en ai payé plus cher que cela et même 100 francs. Il ne s’agit pas non plus, on le voit, d’acheter le ministre, selon les procé dés discrets et indirects que les Juifs savent utiliser pour ces affaires-là. U ne s'agit pas davantage d’acheter, avec ou sans les mêmes précautions, un appoint de voix au Parlement, pour obtenir une majorité favorable à une forte concession, à un important monopole. Il ne s'agit même pas de soudoyer quelque gros personnage technique chargé de faire un rapport, une expertise ou un contrôle. C’est beaucoup plus modeste, puis qu’il n’est question que d'un louis,d’un pauvre et misérable louis de vingt francs, à glisser dans la main d'un pe tit employé de bureau qui, sachant où est le rapport, en prendra copie à la dérobée. La chose est courante, puisque celte lettre nous révèle, en outre, que son auteur a plusieurs fois payé ces lar cins plus cher que vingt francs et quel quefois cent francs. 11 faut supposer que, dans ces cas-là, il y avait du ris que et que le petit employé à corrom pre se faisait un peu prier. Enfin, on a pu se procurer le rap port, qui est vraisemblablement un ra•Niort de contrôle ou d’expertise. On li donc pu être averti, en sous-main, les reproches laits aux produits ou marchandises fournis aux équipages, ou à l’arsenal, ou aux divers services de la Flotte. On a pu savoir si les épreuves et analyses auxquelles les fournitures ont été soumises ont per mis de découvrir les substances frela tées, au moyen desquelles les fournis seurs ont essayé de voler sur la quali té, ou la quantité des fournitures, sur leur poids ou leur composition, sur leur durée ou leur résistance, quitte à y sacrifier la sécurité des bateaux, la santé, la vie des équipages. Grâce à ces renseignements, on va pouvoir s’arranger en famille, pour parer le coup des refus ou des pénali tés, faire des démarches aux bons en droits, sortir opportunément, avec un petit sourire entendu et jovial, le billet Lieu qui atténuera les effets du rap port défavorable à la recette et mettra...

À propos

Fondée par le polémiste Édouard Drumont en 1892, La Libre Parole était un journal politique avançant des prétentions « socialistes », quoique son anticapitalisme populiste marqué se nourrissait essentiellement de liens présumés entre le capital et la communauté juive. Le journal répandait un antisémitisme virulent à travers de brutales diatribes et des unes sensationnalistes dénonçant quotidiennement des « conspirations ».

En savoir plus
Données de classification
  • gabrielli
  • simon
  • sébille
  • gay-lussac
  • miromesnil
  • poincaré
  • auteuil
  • thureaudangin
  • rauville
  • briand
  • paris
  • toulon
  • marseille
  • la seine
  • france
  • faust
  • berlin
  • bezons
  • austerlitz
  • chambre
  • institut de france
  • académie des sciences
  • université de paris
  • académie des sciences morales et politiques
  • académie des inscriptions et belles-lettres
  • académie française
  • la république
  • m. t
  • drouot
  • parlement