Extrait du journal

LA DEMISSION DE M. CASIMIR-PERIER TJn coup d l A « 9 ,a Llbi*© Parole » OmELm-LA-CRAPU Un administrateur provisoire vient d’être nommé à La Libre Parole. Pourquoi un administrateur provisoire pour un journal qui est en pleine prospérité, pour un journal qui est dans toutes les mains ? La chose est très simple, et je vous la conterai bientôt tout au long. Ainsi que Vitrac l’a appris au public, le Gouvernement m’avait fait offrir un siège de député et de l’argent pour ménager les chéquards. J’avais naturellement refusé, avec la politesse qui fait le fond de mon caractère. Le gouvernement ne se découragea pas ; exaspéré par la publication des scellés du Panama, et sachant que je possédais une jolie collection de photographies, il ihercha un autre moyen. J’avais un ami dans lequel, avec ma nature trop généreuse et trop bonne, j’avais mis toute ma confiance. C’était mon représentant dans le conseil des intéressés, auquel je n'assistais jamais ; il signait pour moi, il était mes yeux pour tous les détails administratifs. Cet homme, du nom de Joseph Odelin, était une abominable crapule. Oieliu demanda au Gouvernement une candidature officielle pour lui aux prochaines élections, un évêché pour son frère, le vicaire général, et la croix jour le petit cadet. Dans ces conditions, Odelin se déclara tout prêt à me trahir. Il commença par me présenter un faux bilan, par me déclarer que le journal était perdu et qu’il s’offrait à le sauver par pur dévouement. Je lui ;édai une partie de mes droits. Dans mon ignorance des chiffres, j’acceptai pour sauver l’œuvre. Immédiatement après, on m’écrivit que tout ce qu’on m’avait dit était faux, que j’avais été Jupe d’une manœuvre qui constitue le délit d’escroquerie parfaitement caractérisé. Naturellement on flanqua Odelin à la porte avec un entrain qui se devine. Odelin essuya les crachats qu’il avait reçus ; il s’adressa au ministre Guérin auquel il prête à tort ou à raison des actes immoraux. Quoi qu’il en soit, il parvint à arracher la nomination d’un administrateur provisoire. A quel titre se présentait-il pour demander la nomination d’un administrateur ? — A titre de créancier ? Il ne l’était pas. A titre de mon représentant? Je lui avais retiré tous mes pouvoirs ! A titre de porteur de parts ? Il avait reçu en cadeau les 40 parts dont il se servait pour ruiner mon œuvre, et il n’avait jamais versé un sou. Vraiment, Monsieur Casimir-Perier, quand il en est réduit à employer de pareils moyens, il faut qu’un chef d’État se sente bien malade et, à votre olace, j’aurais mieux aimé mourir du choléra, comme votre grand-père, que de finir dans la boue. En tous cas, ceux qui ont des intérêts dans La Libre Parole n’ont aucune inquiétude à concevoir. Mon traité me donne la propriété du titre, mais il est certain que, moyennant un pourboire de Rothschild, le président du Tribunal civil, qui vient déjà de commettre une si belle canaillerie, n’hésitera pas à en commettre une seconde en me dépouillant de tous mes droits qui me sont garantis par un traité formel. Il confiera la Chronique militaire à Alfred Dreyfus, le Compte rendu des Chambres à Reinach et la Question des chemins de fer à David Raynal. II est â craindre que, dans ces conditions, le renouvellement des abonnements ne souffre quelque difficulté. 11 ne faut pas s'alarmer pour si peu. Des amis dévoués de notre cause se groupent autour de moi. Mes chers et vaillants collaborateurs, qui sont habitués à toutes les batailles, me sont tous fidèles et je prends l’engagement, au nom de tous, que les droits des porteurs de parts de La Libre Parole seront scrupuleusement respectés. Vive La Libre Parole! Vive la France aux Français ! ÉDOUARD DRUMONT....