Extrait du journal

Je comprends très bien les résistan ces et les colères qu’ont soulevées mes livres au début, et la protestation de tous ceux que nous dérangions dans leur tranquillité un peu hébétée en leur montrant la vie contemporaine telle qu’elle était. Ces peintures sincères étaient faites pour choquer. Quand on l’étudiera de près, en effet, notre époque semblera avoir vécu dans un véritable délire. Ce qui se passe est absolument en dehors, non point seulement des principes qui ont régi jusqu’ici les sociétés organi sées, mais même des lois les plus élé mentaires du bon sens. Le Juif pro mène là dedans sa névrose, et les cer veaux sont tellement pétris, façonnés, disciplinés aux conceptions extraor dinaires qu’Israël a sur toute chose, que l’on songe à peine à s’étonner des spectacles bizarres qui se déroulent sous nos yeux. De loin en loin, d’abord, puis à des intervalles de plus en plus rapprochés, éclate un krach comme celui du Ha vre, et les gens qui ont conservé en core quelque lueur de raison se di sent : « Est-il possible, vraiment, qu’une société fonctionne dans de semblables conditions ? » Regardez la situation telle qu’elle est : voilà des gens qui, au Brésil ou à Java, cultivent des caféiers. Voilà des gens, en Europe, qui prennent du café produit par ces caféiers. On comprend qu’un marchand en gros intervienne, serve d’intermédiaire entre le petit épicier et le consom mateur et dise au d^Laillant : « J’ai acheté tant de sacs de café, l’année a été bonne, médiocre ou mauvaise, je vous vends mon café à tel prix. » Là-dessus apparaît un être de pure superfétation : le Juif, qui n’a jamais vu un caféier de sa vie, qui n’a pas un sac de café à lui et qui ne saurait où mettre ce sac, puisque générale ment il ne possède qu’un bureau et un carnet. Il n’en vend pas moins des millions de sacs de café, il fait la hausse et la baisse à son gré ; quand il gagne, il empoche ; quand il perd, il s’enfuit où il se brûle la cervelle, comme ce grand spéculateur qui avait ravagé la place d’Anvers il y a quelques an nées. Nous avons déjà touché ce point,com me tant d’autres, et dans la Fin d'un Monde nous avions reproduit quel ques chiffres curieux donnes par notre confrère M. Aristide Dody, à propos de ces spéculations éhontées. Pendant l’année écoulée, écrivait notre confrère en 1887,1a spéculation, entraînée par les facilités des marchés à terme avec caisses de liquidation, a opéré sur une seule provenance, le Santos, province du Brésil, qui produit un bon café, véritable richesse de ce beau pays. La récolte à Santos a été d’environ 2,500,000 sacs, chiffre sur lequel il faut baser toutes les appréciations sérieuses. La spéculation avec ces 2,500,000 sacs a fait des opérations qui ont dépassé pour l’année bien sûrement le chiffre fantasti que de 70 millions de sacs, provoquant une hausse de plus de 100 p. 100 sur les prix de janvier 1887. Ou doit noter que la production totale du café dans le monde entier ne dépasse pas 12 millions de sacs et que la consom mation peut s’évaluer à 11 millions de sacs.— Comme on le voit par ces chiffres, il a fallu une organisation savante pour provoquer uu mouvement dépassant de 25 fois la production d’une seule qualité !.. Vous entendez d’ici le magistrat in terrogeant le pauvre diable qui aurait raconté une blague à un marchand pour se faire remettre cent francs à un titre ou à un autre : « N’aggravez pas votre cas par votre cynisme I Vous savez bien que vous avez commis le délit d’escroquerie en cherchant à faire croire à un événement chimé rique et imaginaire. » Le juge se tourne vers l’acolyte qui est assis à coté de lui, derrière le comptoir, et lui dit :« Un an de prison,...