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La Petite Gironde, 22 juillet 1872

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La Petite Gironde
22 juillet 1872


Extrait du journal

petits, petits ! Au fort de Ham, lorsqu’il rêvait le 2 décem bre dans sa cellule, le prince Louis écrivait des idylles sur le paupérisme. Il nommait les ouvriers ses frères, il versait un pleur attendri sur la misère commune, il donr nait délicatement à entendre que, s’il était le maître, les choses n’iraient point de cette façon lamentable. _ Aujourd'hui, c’est le comte dej’aris qyi pince cette gui tare. Les journaux orléanistes s’occupent avec émotion de ses recherches et de ses travaux sur les classes ouvriè res. Et c’est toute une grosse histoire. Il a étudié la ques tion en Angleterre, ce qui rend la chose encore plus sé rieuse, comme vous devez le comprendre. Il est même allé jusqu’à écrire un livre sur les « Trade’s unions.» Dé cidément, c'est un prince sérieux, un prince qui ne court pas le guilledou et qui ne songe qu’à rendre l’âge d’or à ses sujets le jour où il montera sur le trône. Vous vous imaginiez peut-être qu'il était, en ce moment, dans quelque château rafraîchi par des eaux courantes, au bord de la mer, ou bien en pleine villégiature mon daine de quelque ville d’eau. Comme vous vous trompiez! Est-ce qu'il est des loisirs pour un homme qui aura, sans doute, charge d’âmes demain ? Est ce que le prince peut avoir d’autres distractions que celle de songer aux souf frances des travailleurs et aux moyens de les soulager ? Il est tout aux clrsses ouvrières, vous dis-je. Il visite à cette heure les grands centres industriels du Nord, Chauny, Anzin, achevant son enquête, mettant la dernière mam à quelque vaste ouvrage sur la matière. Les larmes me montent aux yeux, positivement. C’est touchant, et il faudrait être un grand scélérat pour ne pas éprouver une émotion respectueuse. Songez donc que ce prince fait cela de gaîté de cœur, et qu’il pourrait manger son argent plus gaîment. Les orléanistes étaient bien embarrassés de leur prince socialiste, j’entends socialiste dans le sens distingué du mot. Un prince qui travaille, qui s’occupe des ouvriers, personne ne croit à cela, et il s’agissait de faire passer un examen aux jeunes femmes, pour bien prouver au public qu’il avait réellement travaillé et qu’il pouva;t être inter rogé sur la matière. Il y avait là une circonstance délicate à faire naître ; mais ces messieurs ont tant d’esprit ! Ils ont trouvé un biais des plus heureux. Le comte de Paris sera entendu par la commission chargée d’une en quête sur les classes ouvrières. Voilà l’estrade imaginée. Elle est solennelle comme il convient. Le prince arrive, vêtu de noir, son devoir sous le bras, le visage doux et grave. Du coup, il passe docteur. C’est un homme politi que, un homme qu’il a beaucoup étudié et beaucoup pensé. Il explique ses longues recherches, raconte ses démar...

À propos

Au début simple déclinaison à prix modique du journal La Gironde, La Petite Gironde devient de plus en plus autonome à la fin des années 1880, lorsque sa diffusion dépasse – et de très loin – celle de son vaisseau-mère pour atteindre les 200 000 exemplaires à l'orée de 1914. Centriste modérée à l'origine, sa ligne éditorialse se droitise au fil des ans, jusqu'à devenir proche de celle de L'Action française dans l'agitation de la Première Guerre mondiale. Sans surprise, le journal sera collaborationniste en 1940, puis interdit en août 1944.

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