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La Presse, 21 mars 1838

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La Presse
21 mars 1838


Extrait du journal

la peine qu'on y attache tant de valeur, lorsqu'il verrait les hom mes qui doivent leur servir d'exemple en faire si peu de cas. Le gouvernement, étant composé d'élémens disparates et tiraillé en sens contraires, ne pourrait donner aucune direction positive et uniforme aux esprits, ni conduire les affaires avec suite et acti vité ; il serait dans l'ordre moral ce qu'est dans l'ordre physique un corps placé entre deux forces opposées, il resterait immobile ; on bien, s'il voulait agir à tout prix, il se précipiterait tour-à-lour dans des routes diverses, donnant satisfaction tantôt à une partie du cabinet, tantôt à l'autre, et flottant dans une mobilité perpé tuelle. Comment relever, réorganiser, raffermir le pouvoir avec de tels moyens? Si l'on se proposait de l'affaiblir, de le ruiner complètement, et d'entraîner dans sa chute toutes les convictions nationales, on ne s'y prendrait pas mieax ! Sommes-nous placés, d'ailleurs, dans l'une des conditions qui rendent les coalitions nécessaires, et par conséquent légitimes ? Nous l'avons dit plus haut : quand les factions descendent en ar mes dans la rue, quand tous les intérêts de la vie sociale sont ex posés à s'engloutir dans l'abîme de l'anarchie, les bons citoyens peuvent et doivent se coaliser pour prévenir la perte de l'état. On comprend que chacun sacrifie alors ses propres idées, et ajourne la manifestation de ses principes pour courir au secours des lois, pour aller éteindre l'incendie qui menace de tout dévorer. Ce n'est plus calcul d'ambition, c'est patriotisme, c'est dévoûment à la chose publique. Mais se coaliser dans les momens de calme, lorsque les lois ni l'ordre ne sont compromis; couvrir d'un voile, et renier en quelque sorte ses principes pour réussir à entrer dans le même cabinet, lorsqu'il n'y a pas urgence, lorsqu'il n'y a pas péril pour l'existence du pays, qu'est-ce autre chose, au fond, ( que subordonner ses opinions à ses prétentions, et ses maximes politiques à la soif du pouvoir ? Sachez-le bien, une semblable coalition, dans les circonstances présentes, serait regardée comme une œuvre d'égoïsme, comme une affaire d'ambition personnelle. On se demanderait pourquoi vous vous rapprochez, après que vous vous êtes si publiquement et si. hautement séparés dans de graves sujets de politique intérieure et extérieure; on chercherait la raison de cet étrange renoncement à vos principes, et comme on ne la trouverait point dans la grande nécessité du salut de l'é tat, on n'apercevrait plus en yous que des hommes qui ont saisi le pouvoir, quoi qu'il en ait coûté à leur conscience. Admirable ma nière de rendre au gouvernement la dignité qu'on lui reproche d'avoir perdue ! Merveilleux moyen de rétablir l'ordre moral ! Une coalition serait-elle devenue nécessaire, peut-être, parce que" le ministère du 15 avril aurait manqué aux devoirs de l'é quité, de l'intégrité politique, ou trahi la dignité nationale? Le centre droit et le centre gauche seraient-ils forcés d'abandonner les opinions qui les divisent pour prévenir une démoralisation honteuse, pour empêcher l'avilissement du pays? Mais non ; nul homme parlementaire qui sait respecter les autres en se respec tant lui-même, n'oserait imputer au ministère des fautes de cette nature. Le gouvernement n'a point forfait à la moralité sociale ; il n'a point livré l'honneur de la France aux dédains de l'étranger; il a maintenu dans ses actes les règles de la justice et la dignité du pays. Yous ne pourriez pas faire plus à cet égard qu'il n'a fait ; vous n'auriez pas un autre système à suivre que le sien. Où serait donc la nécessité de votre coalition? Apprenez-nous quelle haute maxime de.juslice à été violée par le cabinet ! Dites-nous quel mé pris il a subi des puissances étrangères ! Yoyons : seriez-vous les représentai de l'une de ces grandes lois morales et politique^, au rétablissement desquelles il est permis de subordonner ses diffé rences d'opinions sur des points secondaires ? Alors, votre coali tion est bonne; sinon, quel jugement voulez-vous qu'on en porte? et à quelles causes prétendez-vous qu'on la fasse remonter. On demande avec instance une majorité forte, stable, bien or ganisée, marchant d'un pas ferme et fidèle avec le pouvoir. Eh! qui ne désire pas cela ? Comment ne serait-on pas heureux, bien entendu que nous ne parlons pas des factions dont le seul...

À propos

La Presse, fondé en 1836 par Émile de Girardin, fut l’un des premiers grands quotidiens populaires français.

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