Extrait du journal
A PROPOS D ONC LIGUE Hier, a eu lieu, à la salle des Ingénieurs civils, une importante réunion où s’est constituée une Ligue de contribuables fran çais contre l’impôt sur le revenu et l’in quisition fiscale. Bravo ! La note communiquée aux journaux pour rendre compte de cette réunion débute par cette observation qui tient à cœur par des sus tout, on le devine, aux fondateurs de la Ligue : « Ce qui caractérise ce nouveau groupement, c’est d’abord que tout élément politique en est exclu. » Un peu plus loin nous lisons encore ceci qu’on a pris soin de-souligner : — « Des industriels' et des commerçants ont résolu de se grouper, sans aucun caractère politique, dans le seul but de combattre le projet de loi établis sant l’impôt sur le revenu. » Ce qui revient à ceci : Primo : Une ligue est fondée pour com battre l’impôt sur le revenu. 1 Secundo : La ligue s’enlève tous les moyens d’atteindre son but. La loi de l’impôt sur le revenu est une œuvre essentiellement politique, arrachée à des hommes politiques pour des raisons politiques par des moyens politiques. Pour être plus clairs, disons que c’est une en treprise électorale, et que les députés qui l’ont soutenue n’ont été touchés que par des arguments électoraux. Pour les persua der on ne lepr a point dit seulement : ceci est excellent ; mais on leur a fait entendre que s’ils n’approuvaient pas, ils soulève raient contre eux les intéressés qui sont irrésistibles par le nombre. Les commerçants et les industriels qui ont eu la bonne pensée de se liguer pour combattre le projet de loi voté par la Chambre sont bien mal informés et bien naïfs s’ils croient que les députés de la majorité ont besoin d’être éclairés sur les conséquences désastreuses de la loi ; dé sastreuses pour les contribuables, c’est en tendu ; mais désastreuses pour eux ? C’est une autre affaire. Il s’agit uniquement de s’avoir si, en repoussant le projet de loi, ils auraient satisfait plus d’électeurs qu’en le votant. Tout est là. Or, le projet est redoutable par cela précisément qu’il est établi contre l’inté rêt permanent et manifeste de la France, pour l’intérêt momentané et illusoire de la majorité des votants. Il consiste, en effet, à faire payer l’impôt par la minorité des électeurs et à le faire voter par la majo rité. Il n’est pas un seul député qui ignore à quelle œuvre de basse démagogie il s'associe. C’est bien œuvre absolument inutile que de se liguer pour instruire les députés. Ils ont entendu dire, fort éloquem ment et fort souvent, ce qu’on voudrait tar divement leur apprendre. Mais la Ligue en formation semble ne pas vouloir s’en te nir là. Elle annonce qu’après avoir « essayé de faire réfléchir les hommes politiques, non moins ‘ignorants que la majorité des contribuables » eiïs utilisera des moyens variés : conférences, brochures, affiches, pétitionnement... « Il faut atteindre tous les contribuables jusqu’au fond du plus pe tit hameau. » Fort bien ! Mais qu’est-ce que vous allez lui demander à ce contri buable ? Il n’a, lui, qu’un moyen de faire connaître ses préférences et de faire pré valoir sa volonté que vous aviez formée, c’est le bulletin de vote. Vous avez beau dire et beau faire, votre action aboutira à un conseil électoral, à une action politi que. Et alors, pourquoi ne pas en convenir tout de suite ? Pourquoi ne pas prdtiamer ceci : la Ligue a pour but de remplacer la majorité qui a voté l’impôt sur le revenu par une majorité qui détruira son œuvre. Hors de là, il n’y a plus qu’équivoque et impuissance. L’impôt sur le revenu, qui est si nettement opposé à toutes les aspirations et à tous les intérêts du commerce et de l’industrie, n’aurait jamais été voté par une...
À propos
Face à une gauche qui ne parvient pas à contenir ses partisans, Léon Gambetta entend rassembler une majorité de républicains autour d’un nouveau quotidien, organe de l’Union Républicaine : La République française. Grand journal à 15 centimes, il consacre une part importante de son contenu aux nouvelles de province et joue un rôle considérable dans la victoire des républicains contre les conservateurs. La mort de Gambetta provoque de facto un infléchissement de la publication qui s’éteint lentement jusqu’en 1931.
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