Extrait du journal

demeurèrent sans action sur un vieux corps depuis longtemps insensibilisé par la folie. Elle reprit connaissance, pour tant. quelques heures avant de mourir. On l’avait transportée dans un petit salon plus clos et plus chaudement meublé que sa cellule. Jacques, qui la veillait, vit ses paupières sc soulever : lentement son es prit s’éveillait, étonné d’abord, puis heureux, puis terrifié quand un effort, dont l’agrandissement du regard trahit la violence, tenta de briser les liens qui étreignaient tous ses membres. Scs veux tombèrent sur un petit secrétaire placé au pied du lit; ils s’y attachèrent longue ment, avec une fixité étrange, tandis que la contraction des sourcils révélait une tension douloureuse de la pensée, la lutte de l'âme encore vivante contre le corps pétrifié qui l’écrasait ; ils so tournèrent enfin vers Jacques, qui y lut un si profond désespoir en mémo temps qu’une volonté si impérieuse et si nette qu’il se leva tout droit, comme porté par cette volonté suprême, et, guidé aussi sûrement que par le geste ou par la parole, il arriva devant lo secrétaire. Un cillement répété lui ordonnait d’ou vrir un tiroir, puis un portefeuille qui s’y trouvait. Il obéit et bientôt furent étalés sur le lit des titres de rente au porteur qu’il dut compter et qui représentaient une valeur d’environ trente mille francs. — Est-ce là ce que tu demandes, ma mère ? dit-il. — Oui, lit un clin d’yeux do la dévote. — Qu’en veux-tu faire ? Tu veux les donner ? Une rougeur d’impatienco monta aux joues do Félicie : son fils ne la comprenait pas. — Les donner à l’Eglise? —A M. Fran çois? poursuivit doucement Jacques. " — Non ! non ! non ! répétait la dévote d’un battement de paupières rapide, pres que furieux. Jacques so désespérait ; il songea à re jeter les papiers au fond du meuble où il les avait pris et à détourner les pensées de sa mère; mais colle-ci, avec des gémisse -...