Extrait du journal

mon nom. Une voix amie, dans la situa tion où j’étais, c’est déjà le salut. Je me retournai vivement et me trouvai dans les bras d’un vieux camarade du régi ment. — Tu vois, me dit-il après que noas nous fûmes embrassés cordialement, je suis maçon maintenant, j’ai repris mon ancien état, je reviens de l’ouvrage et je vais souper; à tpn service, marquis, si le cœur t’en dit. — J’étais trop heureux de l’avoir rencontré pour repousser son in vitation ; je l’accompagnai donc jusqu’au logis. Il était marié et avait déjà toute une nichée d’enfants qui lui sautèrent au cou dès qu’il entra. Sa femme, une brave et digue femme comme elles sont presque toutes dans ce monde-là, m’ac cueillit comme un ami, et je fus tout de suite de la famille. Ca me remuait le cœur de me trouver au milieu de gens franchement et sincèrement heuteux, au milieu de gens qui s’aimaient ; j eu avais les larmes aux yeux. On soupa, puis les coudes sur la table on causa. Ils n’avaient rien à me confier eux, toute leur vie était là devant moi ; je leur racontai la mienne, elle les toucha. Lorsque j’eus tout dit, il y eut un moment de silence ; mon arni, la tèie appuyée sur la main, me regardait bien en face comme s’il eût cherché à lire quelque chose sur mon visage — La Houssaye, me dit-il brusquement, es tu un homme ? — C’était le mut dont s’é tait servi mon père mourant. — Oui, lisje, ou du moins j’en veux devenir un. — Eh bien, reprit-il, mon idée est que tu n’as rien à attendre des gens à qui tu t’es adressé jusqu’à présent, tu ne peux rien pour eux, iis lie feront rien pour toi. Or, il faut manger ou mourir, pas «le mi lieu; pour manger, il faut travailler, mendier ou voler. Tu choisis le travail, c'est bien, mais lequel ? Ou n’a pas le choix toujours. Ne trouveras-tu pas tes mains trop nobles pour la besogne qui convient aux miennes ? — Je fis signe...