Extrait du journal

Elle se trouve à deux pas de la Bourse, si bien qu'après avoir laisse derrière vous la laide bâtisse où la foire aux gros sous se déroule dans un vacarme d’asile d’aliénés, vous rece vez de la salle silencieuse, vaste, haute et large, la même impression que d’un temple. Les neuf fenêtres en rosace qui trouent le plafond ta misent discrètement la lumière ; vous les dénombrerez, lointaines, en le vant très fort la tête. Les trois au tres baies, qui donent sur la cour, dispensent un jour plus cru, mais vous avez tout loisir de leur tourner le dos — s’il se trouve encore une place libre — et de choisir un siège dans une des rangées qui regardent le fond de la salle. Là, vous n’aurez pour horizon que la perspective des magasins, ces rayons qui se rejoignent à l’infini comme les peupliers des routes d’été. Ils proposeront à votre méditation des sujets multiples. En particulier, si vous avez vous-même commis quel ques ouvrages, ces myriades de volu mes qui dorment sous leur poussière vous inspireront une humilité dont vous savourerez l’amertume : com ment peutron encore user sa vie à écrire, alors qu’il y a déjà tant de pensées humaines momifiées là ? L’ambiance est lénifiante. Je n’irai pas jusqu’à dire que l’air que l’on res pire ici est celui des cimes, surtout...