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Le Cafard muselé, 15 mai 1917

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Le Cafard muselé
15 mai 1917


Extrait du journal

saintes résolutions, et qui auront singulièrement trempé leur âme 1 Patata. — Il y a des gens qui aiment mieux la mort que la guerre... Patati. — D’autres, mieux la mort qu’une paix mal heureuse. Docteur Pascal. — Toute opinion peut être préférable à la vie dont l’amour paraît si fort et si naturel. Le but de la vie est cependant le bonheur. Patati. — Le vrai bonheur consiste à cultiver son jardin à soi. Bast pour les autres ! Patata. — Chacun a ses besoins. Docteur Pascal. — Et chacun n’aime que ce qui peut les remplir tous. Or, seule la médiocrité est bonne. C’est sortir de l’humanité que de sortir du milieu. La grandeur de l’âme humaine consiste à savoir s’y tenir. L’homme sera d’autant plus heureux qu’il sera moins attiré par les désirs de ce qui est en dehors de son milieu. Patata. — Té ! voilà un jeune poilu qui se ramène des tranchées. Hé ! permissionnaire, viens donc nous dire comment il faut faire pour être heureux. Victor. — Comment, les vieux papas, c’est à- moi que vous demandez cela? Mais tout d’abord on ne peut être heureux que quand on a abattu l’ennemi... Patati. — Bravo 1 Docteur Pascal. — Et on a des ennemis de,toutes sortes ! Victor. Pour ça, c’est bien vrai, et dans les tranchées on a le temps d’y penser. Docteur Pascal. — L’homme est fait pour1 penser, c’est toute sa dignité et tout son mérite ; et tout son devoir est de penser comme il faut. Or, à quoi pense le monde, que de fois sa pensée est sotte... Patata. — Mais laissez donc parler ce jeune homme ! Victor. — Vous me demandez ce qu’est le bonheur ? Mais, c’est de manger quand on a faim. Docteur Pascal. — Le tout, c’est de ne pa.s attraper une indigestion. | Victor. — Le bonheur réside généralement dans les satis factions égoïstes. Plus l’assouvissement est complet, plus la jouissance est de courte durée ; plus l’ambition grandit, plus son aboutissement se trouve éloigné. L’attente de la satis faction en augmente le besoin et engendre la passion. La passion égoïste dépasse toujours le réalisable, elle produit la déception qui est l’évanouissement du bonheur......

À propos

Le cafard muselé fut un journal des tranchées édité et imprimé à Bordeaux. Bimensuel, il parut tous les 1er et 15 du mois entre 1917 et 1919. Le journal était tiré sur près d’une quinzaine de pages et était orchestré par un directeur de rédaction signant « Le Gosse ». Il se revendiquait « organe du foyer du soldat », soit un espace de retraite dans les casernes et établissements militaires, sous le contrôle et avec l'agrément de l'autorité militaire, où les sous-officiers et les soldats trouvaient des livres, des jeux d'adresse ainsi que de quoi écrire.

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Données de classification
  • bast
  • telephone
  • france