Extrait du journal

Du boulevard des Italiens, Dimanche 28 février 1875. Monsieur le rédacteur, Te Demi laudamus, la République est proclamée ! Le pays va chanter les louanges de l’Assemblée de Versailles. Qui s’y serait jamais attendu? Le financier Ratapoil et le financier Mordoré n’ont pas cru devoir laisser passer ce grand événement sans protester quelque peu au nom des spécula teurs bonapartiste et légitimiste. Rs se sont donc rendus bras dessus, bras dessous, chez M. de Villemessant, au Figaro : — Mon cher ami, lui out-ils dit, il s’agit de dé montrer que les votes de l’Assemblée de Versailles ne sont pour rien dans la grande hausse de ce moisci, mais qu’en revanche, il est de toute justice de leur attribuer le mouvement de recul qui s’est pro duit deux jours après les premiers voles qui ne mettaient plus en doute l’adoption de la loi Wallon. Ce sera peut-être un peu difficile a faire avaler à ceux qui savent commeut les choses se passent à la Bourse. « C’est, en effet, une loi du marché que quand on achète pendant quinze jours en prévision d’un fait, et que ces achats produisent un fort mouvement de hausse, les réalisations qui succèdent au fait accom pli amènent une réaction inévitable ; mais comme vous êtes un homme de ressource et, de plus, une grande autorité financière, il ne vous sera point dif ficile de faire prendre à vos lecteurs des vessies pour des lanternes et de leur prouver que si l’Emprunt,après avoir fait 102 80, est revenu aux environs de 102, la cause n’en est pas aux idéalisations de bénéfices, mais à la République. Les gens sérieux hausseront les épaules, mais nos amis s’y laisseront prendre, et nous leur ferons boire du lait pendant vingtquatre heures : et c’est là l’essentiel. Et voilà ce que M. de Villemessant a essayé de prouver dans quelques lignes à sensation, à la grande satisfaction de Ratapoil et de Mordoré, mais non pas tout à fait à celle de leurs amis, les gens du monde, qui s’étaient flattés de vendre mieux leurs rentes après le vole, et qui ont été fout étonnés de voir qu’il en était tout différemment. La situation Que vous disais-je dans mon dernier Bulletin? On escompte par une hausse de trois francs la constitu tion d’un gouvernement définitif; ceci fait, on réac tionnera. Cette théorie vieille comme le monde s’est vérifiée une fois de plus à la Bourse, n’en déplaise au grand financier jjVillemessant ; mais la réaction a été fort courte, deux jours en tout elle a duré, car dès mercredi le cours de 102 francs sur l’Emprunt était reconquis et dépassé. La République existe légalement, il s*agit mainte nant de former un ministère. Cette besogne a [été confiée à M. Buffet. Ce qui nous préoccupe surtout...