Extrait du journal

Monsieur le rédacteur, Vous avez signalé deux fois en trois jours les abus qui résultent de la vente plus ou moins clandestine des volumes et brochures adressés à des ministres et autres sommités sociales. Ce pendant, cette habitude de convertir des livres en sous et deniers, pour me servir de votre ex pression, a du moins un côté flatteur pour les écrivains : elle prouve que les vendeurs attachent un certain prix à ces œuvres, puisqu’ils savent se les faire payer. Il y a, d’ailleurs, grand profit pour cer tains écrivains à n’être jamais lus, surtout pour ceux qui briguent les faveurs du ministère; car ils courent alors la chance qu’on leur accorde de con fiance ce qu’ils n’obtiendraient jamais si on avait la mesure de leur savoir-faire. C’est sans doute à cet optimisme trop crédule qu’on doit attribuer les choix inintelligens du pouvoir, qui prodigue les fonds destinés à encourager les gens de lettres à ceux-là précisément qu’il faudrait s’efforcer...