Extrait du journal
Lettre circulaire d'un préfet aux maires de son département. Monsieur le maire, Des hommes malintionnés faisaient courir depuis quelque temps le bruit que le gouvernement hésitait sur la question des candidatures officielles. De vils calomniateurs assuraient que le ministre de l’intérieur, ébranlé par le mouvement de l’opinion publique, docile aux conseils des amis eux-mêmes du régime impérial, allait renoncer au système suivi depuis 1852 et qui consiste à dicter des choix au suf frage universel. Dieu soit loué, il n’en est rien, et la candidature of ficielle continuera de fleurir dans notre beau pays de France. Je suis donc heureux, monsieur le maire, de porter ce fait à votre connaissance et de vous annoncer que vous aurez encore à mettre en campagne le gardechampêtre, à user de toutes les influences permises ou non dont vous pouvez disposer, en qualité de membre d’une administration omnipotente. J’espère, monsieur le maire, que vous comprenez bien la théorie du suffrage universel. Elle est simple, claire et nette, Un enfant de six mois la posséderait sur le bout du doigt après un quart d’heure d’explication. Rappelez-vous surtout ceci : le suffrage universel, c’est l’autorité. J’ai de la poigne, et je le prouverai aux prochaines élections. Je vous ferai connaître le nom de l’élu que nos braves paysans doivent envoyer à la chambre. Aussitôt vous transmettrez ce nom à toutes les auto rités constituées de la commune. Vous chargerez la gendarmerie et le garde cham pêtre de distribuer jusque dans les plus infimes chau mières les bulletins où flamboiera le nom sacro-saint. Vous réunirez autour de vous les électeurs, et vous leur expliquerez que le candidat choisi par le gouver nement n’attend plus que la formalité de leur vote pour aller porter au gouvernement l’appui de son ap probation constante et de son dévouement à tout crin. Ce système est bon, monsieur le maire, et ce qui le prouve dune façon éclatante, c’est que ce système est celui du ministre à qui je dois ma préfecture, à qui vous devez vos fonctions municipales, du ministre qui peut nous décorer tous les deux si nous travaillons avec activité et énergie la matière électorale et nous en voyer planter nos choux dans le cas contraire. Pour vous guider, je fais dresser un tableau où se trouvent indiqués en regard les vertus de tout candi dat gouvernemental et les vices de tout candidat indé pendant. Vous n’avez qu’à l’apprendre par cœur et à le réci ter, ce qui vous épargnera les frais d’imagination. Soyons donc joyeux, monsieur le maire, et fiers de notre mission. Nous allons continuer, comme par le passé, de re présenter la France, de décider des destinées de la pa trie, de l’Europe, du monde entier. En effet, monsieur le maire, quoi qu’on en dise, le gouvernement ne pouvait rien sans le Corps législatif, et le pouvoir qu’il a entre les mains ne serait qu’un...
À propos
Fondé par Charles Philipon en 1832, Le Charivari fut le premier quotidien satirique illustré au monde. Régulièrement poursuivi pour sa critique de Louis-Philippe, le journal disparaît néanmoins bien plus tard, en 1937.
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