Extrait du journal

LE MARCHAND D'OR. TROISIÈME VOLUME. L’écrivain quitta la plume, se leva et s’en alla doucement, laissant sou cahier ouvert. Il n’y avait pas grand danger à cela, d’ailleurs, car la moitié de ce que nous venons de lire était tracée en carac tères de convention parfaitement indéchiffrables : c’éiail ure pré caution contre l'indiscrétion. Georges Cadièrc, — le lecteur Va reconnu, — ou plutôt Jacques Lambert, puisque c’est ainsi qu’i' sc faisait appeler, s’en alla sur la pointe du pied vers la chambre à coucher de son enfant. C’était une pièce grande cl riche d'ameublement ; tout ce que l’amour d’un père peut inventer de plus beau, de plus chatoyant, de plus ravissant était réuni dans celte chambre à coucher. r C'était d’abord un admirable tapis de Perse qui recouvrait tout le parquet ; puis une tenture fond bleu, avec des rideaux de soie de même nuance aux fenêtres ; puis un lit de palissandre sculpté, garni d’edredon en duvet de Russie, de draps de toile de Hollande, et d'oreillers à taies de batiste brodées à jour. C'était ensuite un forte-piano en bois de rose avec ornements eu cuivre doré, et qu'accompagnaient six fauteuils recouverts en velours d'Utrechl foncé, et au pied desquels se voyaient six petits tabourets richement tapissés, puis une chiffonnière, une pendule vieux-Scvres, cl une multitude de gracieuses inutilités qui rcmplisseui si bien les places qu’elles occupent. Louise venait de se réveiller lorsque Jacques Lambert entra : deux bougies brûlaient sur la cheminée, dans l’à re de laquelle pétillait doucement un bon l’eu ; la lumière des bougies était d’ailleurs atténuée par deux abat jour. C’est vous, petit père? demanda la jeune fille. Oui, ma Louise, c’est moi. Tu es réveillée? Depuis une minute. Et comment as-tu dormi ? _ Oh ! à merveille !...