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Le Gaulois, 11 août 1886

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Le Gaulois
11 août 1886


Extrait du journal

C'est évidemment &e qui a fait dire à i un écrivain de théâtre que les comédiens en tournée étaient les missionnaires de ï l'idée. L'idée de qui, l'idée de quoi? Ah t 3 voilà ce que l'on ne peut savoir exactement, et cela importe peu. Ils sont les missionnaires de l'Idée, et cela. sufnt. Ce n'est pas pour le vain plaisir de gagner de l'argent qu'ils vont très loin, par delà les océans, montrer leurs visages grimés; c'est pour semer l'idée, d'un geste auguste, sur des terres où n'a point encore ) germé le grain intellectuel, où n'a pas ileuri encore cette fleur pensante de civilisation. Conquérir des âmes nouvelles au progrès, arracher des cerveaux à la L nuit des barbaries rastaquouériques, façonner les peuples sauvages du Pérou ,< aux belles cultures des coulisses parisiennes, taire pénétrer dans les cœurs frustes et brésiliens les hautes leçons de morale de M. Albin Vaiabregue et les consolations philosophiques de M. Paul Burani, porter l'apostolique parole de M. Galipaux et le Verbe sacré de M. Christian dans les tribus anthropophages de Baltimore et de Cincinnati, telle est donc la mission des comédiens en tournée. Ah c'est une belle et grande mission, il n'y a pas à dire le contraire. On avait cru,, jusqu'ici, que le départ de M. Coquelin pour l'Amérique n'était qu'une heureuse 1 spéculation; on avait osé prétendre que 1 l'éminent démissionnaire de la ComédieFrançaise n'avait, en s'exilant, que le na- 1 turel désir d'aller chercher son million, l ce million bienheureux et transatlantique 1 qui l'attend depuis si longtemps. Eh bien, non. M. Coquelin ne songeait qu'à semer l'idée sur la patrie de Washington et de 1 M. Gordon Bennett. Il n'emportera pas de costumes dans ses malles, ni de perruques, ni de fausses barbes; il y mettra l'idée, toute l'idée, et, une fois là-bas, 1 le tablier de semeur aux reins, il arpentera les champs, les forêts et les jungles J' à grandes enjambées, et il fécondera le 'sol américain. Et, le soir, assis à l'ombre d'une pamplemousse, il parlera de Sarcey le Père aux petits enfants tout nus et charmés....

À propos

Lancé par Edmond Tarbé des Sablons et Henri de Pène en 1868, le journal de droite Le Gaulois se définit comme un « journal des informations du matin et moniteur de l’ancien esprit français ». Sans surprise, son lectorat, assez limité, appartient essentiellement à la grande bourgeoisie. En 1929, le journal est absorbé par Le Figaro.

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