Extrait du journal

Le Midi vient de terminer la semaine de l'Huile d'olive et de célébrer avec , pompe les noces d'argent de la Corniche d'or. Nous avions bien organisé naguère, nous les gens de Paris, une semaine de bonté : on fête ce qu'on a sous la main pu ce qu'on y voudrait avoir. Le soleil s'amuse de là-haut à lutiner les gens du Sud, et il les entraîne à toutes les exubérances des mots et des gestes dans l'ébloyissement de ses rayons. Car c'est le soleil qui colore notre vie, et nous n'avons inventé les couleurs que.pour nous donner l'illusion qu'il soit tou jours là. Ici, le soleil met du bleu sur la mer, du bleu dans le ciel et du blanc sur lés routes. Sous les pas légers des femmes il parsème de fleurs la terre, et dans la joie d'avril il en accroche à tous les murs. En tous lieux, selon qu'il se dé robe, ou qu'il se prête à peine, ou qu'il se donne un peu, ou qu'il se prodigue avec fureur, sa seule puissance crée diversement l'atmosphère. Et, en créant l'atmosphère, il façonne les individus. Il détermine nos manières de nous tenir et de nous vêtir, de parler et de manger, de nous fatiguer, de nous reposer, et naturellement nos manières de voir. Considérez tour à-tour, dans l'émoi de la danse, les filles du Nord et celles de la Grèce, et comparez leurs attitudes et le rythme de leur balancement. Montes quieu n'avait pas si tort, ni Taine, de qui c'est maintenant la fête, en attri buant une telle importance au climat, au climat qui n'est que la disposition du soleil vis-à-vis d'un pays.' On ima gine les danseuses de la patrie d'Ossian fuyant et tournoyant sous l'inspiration de la pluie et les danseuses de Corinfhc ou de Tanagra se plaisant à marier leurs pas avec les rayons du soleil. Et peut être faut-il dire que' les Russes, qui, emportées et subtiles, nous fascinèrent, accordent les leurs au rythme du vent. Pilles du vent, du soleil ou de la pluie....