Extrait du journal

La jeune 611e se souleva de dessus les coussins de soie pâle où elle songeait accoudée et, B'étant approchée de la haute fenêtre ouverte, regarda longtemps du côté de la ville, au-dessus des ombrages du parc. Dans la vaste chambre tendue de tapisserie de soie, un groupe de suivantes tourmentait doucement les cordes de théorbes et de grands archisuths, toute la tour octogone était emplie d'un vague et délicat murmure que la jeune fille n'entendait pas, caria princesse Ottilia était muette, muette de naissance et sourde aussi, comme il arrive presque toujours en ces pénibles cas et murée dans son infirmité, il y avait déjà plus de vingt-cinq années qu'elle vivait retranchée de la vie, sans autre communication avec ses semblables que quelques gestes vagues à la longue adoptés par ceux qui la servaient,etelle restait triste sous ses longs habits de brocart ciel ramage de fleurs d'or ou dans ses lourdes gaines de drap de soie violette brodées de dragons verts, deux nuances qu'entre toutes elle affectionnait, si triste qu'on ne l'avait jamais vue sourire, et ses grands yeux couleur d'eau morte, sans rêve et sans pensée, brillaient sous ses paupières du terne éclat d'une pierre fausse....