Extrait du journal

Un tel oubli serait inexplicable si l'on ne se rappelait qu'il existe, à l'heure qu'il est, un certain nombre de régimens qui ont été entièrement renouvelés et où l'on ne trouve plus ni officiers ni. soldats ayant combattu aux premières heures de la guerre. J'en sais.un où, de ces premières heures, il ne reste plus qu'un seul officier, et lui seul, par conséquent, pourrait raconter l'histoire de son régiment depuis sa mobilisation jusqu'à la fin des hostilités. Je causais l'autre jour avec lui et, en l'écoutant, je ne pouvais me défendre de la plus poignante émotion tandis qu'il me décrivait des traits dont il n'a jamais été parlé. Je me demandais s'il ne serait pas bon que, partout où la situation est pareille, les colonels fussent autorisés à faire écrire par un témoin, fût-il unique, l'histoire du régiment. Ce serait un précieux trésor pour nos archives militaires et une juste réparation envers les vivants et les morts. Les vivants, pour peu qu'ils soient lettrés, pourront tôt ou tard 'raconter leur épopée mais, les morts, qui parlera pour eux, si ce n'est les chefs qui les ont commandés ?...