Extrait du journal
Je ne dis pas que nous soyons toujours des anges il n'y a,plus d'anges sur terre depuis l'incident du paradis. Il -est même certain que nous avons quelques travers. Nous recourons trop vite 'dans la discussion au mot qui cingle, ,qui pique et qui laisse,, derrière lui, une blessure. Nous avons -trop tendance à (̃généraliser et à croire qu'un Curzon représente toute l'Angleterre et qu'un 'Wells incarne toute la pensée anglaise, oubliant qu'il y a aussi de l'autre côté de ,la Manche des Balfour et des Steed. Nous 'avons .surtout le soupçon trop rapide et ,ne nous souvienons pas assez que si les affaires de ce monde marchent mal, m'est plutôt dû à la bêtise qu'à là canailbrie. De tout cela, je crois que nous (pouvons et devons nous accuser. J'ajouterai que, même si le nuage doit grever, le peuple de France n'oubliera ,guerre,, a fait le peuple d'Angleterre. Il V a, le long de la voie ferrée de Paris à j Boulogne, près d'Etaples, une plaine Entière couverte de petites croix blanches et, sous chacune de ces croix, il y a un Tommy qui dort son dernier somfmeil en terre de France, sur cette terre ;qu'il est venu défendre au prix de sa vie. Ce sont là des choses qui ne s'effacent 'jamais de la mémoire. Il m'est arrivé bien des fois, depuis deux ans, quand, plume en main, j'ai critiqué un peu vivement les hommes ou les choses d'Angleterre. de penseur à ces milliers de croix. Il m'est arrivé aussi bien des fois de songer à cette mutinée du 5 août 1914 où j'ai versé les vraies larmes de joie de ma vie, en apprenant que la flotte anglaise mobilisait pour venir combattre avec les armées de la France. Et;' chaque fois,. j'ai adouci l'amertume de certaines de :mes lignes, ou je l'ai regrettée. Mais l'Angleterre; qui a des qualités admirables, a un défaut terrible c'est de ne, jamais vouloir tenir compte des intérêts, -de. ses admettre qu'ils fassent la même chose qu'elle fait c'est de ne jamais comprendrë qu'ils puissent avoir, eux aussi, leurs besoins ou leurs nerfs. C'est là, et nulle part ailleurs, qu'il faut chercher la cause du nuage chargé de foudre qui menace de crever....
À propos
Lancé en 1883 sur le modèle du quotidien britannique le Morning News, Le Matin se revendiquait être un journal novateur, « à l’américaine ». Son directeur Alfred Edwards entendait donner « priorité à la nouvelle sur l’éditorial, à l’écho sur la chronique, au reportage sur le commentaire ».
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