Extrait du journal
Les électeurs pensaient, comme le défunt .Itcichstag, qu'aucune attaque ne viendrait de notre côté. Ils craignaient, comme lui, que M. de Bismarck ne voulût la guerre.. Ils se trouMùcntdéjà écrasés d'impôts, et répugnaient à de nouveaux sacrifices. Comme tous les peuples soumis à un gouvernement très autoritaire, ils découvraient, après vingt ans de patience, qu'on abusait de leur docilité. Le succès du chancelier parut à ce point compromis, qu'il dut employer toute son éloquence et toute celle de ses agents et de ses journaux pour créer un faible commence-ment d'agitation contre nous. Il lut réduit à demander l'appui du pape. Ce qui agit plus que tout celai c'est qu'on croyait généralement qu'il était homme à traiter les électeurs comme il avait traité la Reichstag, et h casser la nouvelle Chambre si elle ne paraissait pas assez soumise. En France, tout le monde eut peur. Il y eut pourtant des optimistes et des pessimistes. Les t optimistes avaient beaucoup do raisons do se rassurer, et ne se rassuraient qu'à demi. Ils -ré-, pétaient qu'il n'y avait pas possibilité de guerre, 'puisque la France n'attaquerait pas et qué M.: de Bismarck promettait de ne pas attaquer. IL --nous a pris, en'1871, tout ce qu'il voulait nous prendre, disaient-ils. Aux dépouilles opîmes de la Franco, il a joint la fondation de l'empire allemand. Ni lui, ni son maître, ni son pays n'ont rien à gagner à une guerre heureuse; l'Europe, qui souffre impatiemment leur prépondérance, ne leur permettra ni un accroissement do territoire, ni un accroissement de puissance. Ils ont, en faisant la guerre, beaucoup a risquor, car, aux yeux mêmes de nos plus grands ennemis, uno guerre contre la Franco est une terrible chance il courir. Ces optimistes ne se sentaient ptts ébranlés, quand M. de Bismarck appelait les réservistes ou massait des troupes sur nos fron:iéres; c'était, suivant eux, une manœuvre électorale. Ils traitaient de même les menaces et les injures des journaux officieux. Tout cela devait disparaître le jour où le nouveau Reichstag reviendrait avec une forte majorité ministérielle. Comment croire à la guerre entre deux peuples qui l'un et l'autre ont intérêt à la paix, et la désirent ardemment? Ils disaient tout cela bien Haut, pour se rassurer et pour rassurer les autres; et cependant ils tremblaient un peu au fond du
À propos
Lancé en 1883 sur le modèle du quotidien britannique le Morning News, Le Matin se revendiquait être un journal novateur, « à l’américaine ». Son directeur Alfred Edwards entendait donner « priorité à la nouvelle sur l’éditorial, à l’écho sur la chronique, au reportage sur le commentaire ».
