Extrait du journal

A lui-même. Oui, Denis Diderot a fait quelques sottises, et il en a peutêtré écrit plus qu'il n'en a fait. Mais tout cela est mort avec lui, ou bien est dans son œuvre à l'état de chose morte. Ce-qui reste, c'est quelque chose qui fait de cet intempérant Langrois un des génies les plus actifs qui aient enrichi notre littérature et modifié la tradition nationale. Si sa tête virait sur ses épaules comme un coq d'église au haut d'un clocher, c'est que son esprit n'était pas rouillé, et qu'il était sensible à tous les souffles du passé et de l'avenir. Taine, dans des pages définitives, a placé Diderot à côté de Montesquieu, de Voltaire et de Rousseau, comme une des quatre figures symboliques qui représentent le mouvement de l'esprit français dont sortit, .à travers la Révolution, la France contemporaine. Et Diderot supporte fort bien le rapprochement. Il ya en lui une force, une richesse, une profondeur qu'aucun voisinage n'écrase. Ce n'est pas l'homme de la méditation solitaire il lui faut la conversation, la contradiction, pour s'échauffer. Mais quand il est parti, rien ne peut plus l'arrêter c'est une éruption qui jette hors de son cerveau, pêle-mêle, dans des torrents de fumée et de boue, les vérités lumineuses, les pressentiments prophétiques, et des jets ardents de lyrisme....