Extrait du journal

LA PRESSE Maintenant que la bourrasque est passée, il serait utile qu'un chercheur, pourvu de loisirs, se plongeât dans les collections de journaux parus depuis deux ans et recueillît toutes les balivernes, toutes les stupidités, tous les mensonges avérés à l'aide desquels oh a torturé et faussé l'opinion. Et non seulement l'opinion du peuple, mais encore celle de certaines classes dites éclairées. L'opinion du peuple est facile à égarer. L'instruction publique a fait, évidemment, des progrès, peut-être inférieurs aux efforts dont ils sont le résultat, mais notables tout de même. Le nombre des gens qui ne savent pas lire se réduit peu à peu à rien. Et celui des gens qui lisent a considérablement augmenté. Il n'est pas aussi grand qu'on pourrait le supposer,-dans les campagnes et même dans les villes beaucoup d'adultes actuels ont déjà oublié ce qu'ils avaient appris a l'école, mais il est tout de même énorme, par comparaison avec le passé. Mais quand bien même l'instruction serait encore plus propagée qu'elle ne l'est quand bien même tout le monde lirait, Une s'en suivrait pas, forcément, que tout le monde aurait du bon sens et jugerait sainement les choses. Et, d'abord, pour juger les choses, il faut les connaître. Or, les gens ne connaissent les choses que par leur journal, et ils sont bien forcés de les admettre telles que leur journal les raconte, puisqu'ils n'ont aucun moyen de contrôle ni d'enquête. ,Et non seulement ils sont enclins à admettre la matérialité des faits, mais encore ils sont enclins à les juger comme leur journal d'abord, parce que ce journal les présente sous unjourfavorâble à ses opinions, et ensuite parce que le lecteur, incapable de contrôler, la plupart du temps, est par cela même, incapable de discuter....