Extrait du journal

FEUILLETON DD PET1T COURRIER. LES DEUX SOEURS. RÉCIT DE LA VIE INI IME. 1. Le soleil descendait vers les limites de l’horizon et teignait le Rhin de ses dernières lueurs, tandis que la flèche de la cathé drale de Strasbourg, œuvre immortelle d’Erwin de Steinbach, commençait à se confondre avec les nuages obscurcis dans l’om bre de la nuit. Déjà les rues de la bonne ville à la physionomie allemande devenaient calmes ; le labeur des ateliers était terminé ; les artisans à la figure placide traversaient les nombreux ponts jetés sur l’Ill en retournant vers leurs foyers, et de loin en loin l’écho apportait quelques accents de ces chœurs harmonieux qui rappellent les mélodies du Nord. Le voyageur qui eut suivi ces rues et observé cet ensemble grave et paisible, n’eût emporté que l’idée d’un bonheur général. Cependant, de même que toute lumière a un côté d'ombre, de même le bonheur dont nous venons de parler a nécessairement des exceptions douloureuses; et trop souvent, lorsque dans une maison règne la joie et éclate le rire sans réserve, dans la mai son voisine le deuil navre les cœurs et mouille les yeux de larmes. Arrêtons-nous sur la place de la cathédrale. Pénétrons dans un modeste logement, d’ordinaire rangé avec la richesse du soin et paré du luxe de la propreté, —maintenant en désordre et rempli de confusion. Là se trouvent trois femmes : une mère mourante, sa fille et une vieille servante, qui est le plus ancien meuble du logis et la seule amie de sa maîtresse. Rien ne saurait peindre la douleur de la jeune fille. Les sépara tions sont aussi une mort anticipée pour ceux qui survivent et qui sentent que la meilleure partie d’eux-mémes va les quitter à ja mais. •— Ma mère, ma mère ! s’écriait Esther d’une voix déchirante; 4is-n?(v,.dis-moi que lu guériras, que je ne resterai pas seule dans...