Extrait du journal
ÉGOÏSME SACRÉ | par LA ROCQUE | JE n'entends pas empiéter sur la tâche de mon cher Ybarnégaray, qui contrôla ici notre rubri que des Affaires étrangères. ' Face aux conflits d'Espagne et d'ExtrêmeOrient, je veux seulement inviter les Français, tout au moins mes lecteurs, mes amis, à rester euxmêmes, conformément à la doctrine P. S. F. Car nos compatriotes ont une furieuse tendance à interpréter les événements extérieurs d'après leurs propres sym pathies, ou d'après les sympathies qu'ils voudraient inspirer. Comme si la seule diplomatie valable ne consistait point, dans le respect de l'honneur national et international, à associer des intérêts concordants, ou à défendre ses propres intérêts ! Le Japon représente une civilisation plus avancée que celle de l'Empire du Milieu. Le gouvernement de Nankin et son chef Tchang Kaî Chek ont été, sont encore, sous l'influence du Kouo-Min-Tang, émanation de Moscou. Et Moscou représente, à travers le monde, la puissance démoniaque acharnée au bouleversement des traditionsi^pieuseSj à la subversion des progrès humains. Examinée sous cet angle restreint, la querelle sino-nippone apparaît au « Français moyen » comme un épisode capital de la lutte entre le désordre et l'ordre, ce dernier représenté par Tokio. Mais la situation est plus complexe. Une victoire importante du Japon conférerait à celui-ci l'influence prépondérante dans la partie occidentale de l'océan Pacifique. Elle mettrait en danger les résultats maté riels, spirituels, acquis par tant de labeur européen sous mille formes variées, dont Shanghaï reste le sym bole. Elle représenterait un succès pour l'Allemagne et ses visées impérialistes, à la mesure même de l'échec éprouvé par la propagande et l'infiltration soviétiques. Elle risquerait de dresser, jusqu'aux confins de l'Asie Centrale, une méthodique, massive invasion faune dont nos enfants ou petits-enfants supporteraient le poids. Elle mettrait enfin, directement, l'Indochine française au contact d'ambitions inévitables parce que confor mes à la nature des choses. Aussi voudrais-je que le gouvernement, l'opinion res tassent maîtres d'eux-mêmes, discrets, distants devant les combats qui se déroulent actuellement autour de Pékin. Informons-nous. Interprétons et commentons les iaifs au jour le jour, avec l'unique soucTdé sauvegarder nos biens, ceux de nos ressortissants, sans oublier notre indépendance politique. Du côté de l'Espagne, les éléments du problème se dégagent plus nettement. D'un côté, le gouvernement dit régulier. Il est à la fois sous la dépendance de Moscou et des éléments anarchistes. Il représente l'immoralité organisée, la lutte acharnée contre cette civilisation occidentale, chrétienne qui est la nôtre. Fut-il cent fois plus régulier, nous n'aurions pas pour lui plus d'estime et moins d'éloignement qu'à l'égard du Komintern. De l'autre côté, le gouvernement de Salamanque, suivant une ligne de conduite qui ne nous concerne pas, mène une lutte à mort contre la barbarie bolche vique. Faut-il donc lui accorder notre appui officiel, con cret 1 J'estime que ce serait la plus grave des erreurs. Le moment serait mal choisi de dégarnir nos frontières de l'Est et d'ouvrir des tentations à nos voisins orien taux. Après l'atonie sociale de ces vingt dernières années, au milieu des bouleversements dus à l'expé rience du Front Populaire, semblable intervention nous es't interdite. D'autre part, nous avons tout à gagner dans une attitude strictement impartiale. Franco' ne se montret-il point déjà inquiet des « options » prises par cer tains de ses amis, trop voyants, sur les lendemains de son pays ?, Lorsqu'il aura rendu à celui-ci sa pleine souveraineté, ne sera-t-il point disposé à une entente avec la France respectueuse de la volonté espagnole, plutôt qu'avec des Etats cherchant à capitaliser sous forme de « concessions » diverses, leurs soutiens de la veille ? » Exprimant sans réticence nos vœux ardents pour la victoire des « Nationaux », je souhaite, et je recom mande une circonspecte neutralité. Elle interdit les échanges scandaleux dont certains milieux officiels ou officieux de l'Aéronautique ont donné, donnent de plus en plus, le spectacle, au profit des dirigeants de Valence et de Madrid. Forte par ses institutions, par son armature sociale, par son prestige militaire, appuyée sur son entente , avec l'Angleterre* sur le bloc de Stresa rebâti, imbue d'égoïsme sacré, la France réconciliée sera le meilleur soutien de 'la Paix mondiale....
À propos
Fondé en 1863 par Moïse Polydore Millaud, Le Petit Journal était un quotidien parisien républicain et conservateur parmi les plus populaires sous la troisième République. Le journal jouit vite d’un succès commercial sans précédent, renforcé par la publication de divers suppléments, parmi lesquels son célèbre « supplément du dimanche » ou encore Le Petit Journal illustré. La publication s’achève à l’orée de l’année 1944.
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